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Etats généraux de l’alimentation : 5 questions pour les animaux

Les enjeux des Etats généraux de l’alimentation, lancés ce jeudi 20 juillet sont de taille. Mais au-delà des problèmes de crise économique du secteur agricole et de santé publique autour de la qualité de notre alimentation se pose la question de la condition animale : fin de l’élevage intensif, préservation de la biodiversité, changement de modèles de consommation, cohabitation des activités humaines avec la faune sauvage … autant de sujets qui ne doivent pas être oubliés dans les réflexions de ces prochains mois.

Etats généraux de l’alimentation : 5 questions pour les animaux
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Pour cette journée de lancement des Etats généraux de l’alimentation (EGA), 500 responsables de l’industrie agroalimentaire, des ONG environnementales et de l’agriculture sont réunis afin de trouver de nouveaux modèles agricoles et répondre à des enjeux économiques, de santé publique et d’environnement. Un projet très ambitieux dont les premières conclusions ne sont pas attendues avant fin novembre. En attendant, les citoyens sont invités à participer à ce grand débat transversal sur nos modèles d’agriculture et d’alimentation. L’occasion de remettre en cause nos pratiques et de s’interroger sur leurs impacts pour les animaux de ferme et de la faune sauvage.

Comment les pratiques d’élevage peuvent-elles respecter le bien-être animal ?

Pour Léopoldine Charbonneaux, directrice de CIWF France, « il est urgent de (…) remettre en question notre surconsommation de produits animaux, car c’est elle qui nourrit les élevages intensifs, néfastes aux animaux, aux hommes et à la planète. L’inquiétude que l’on a aujourd’hui sur ces EGA, c’est de savoir si l’on va vraiment aborder cette question essentielle ». L’association plaide ainsi pour « une alimentation responsable », qui peut être mise en place par « plusieurs leviers » notamment économiques alors que le Président a annoncé un plan d’investissement de 5 milliards d’euros pour l’agriculture sur 5 ans. « Il faut qu’il y ait des incitations financières pour réellement changer les modèles de production souligne Agathe Gignoux, chargée d’affaires publiques au CIWF. Des exemples de bonnes pratiques nous sont déjà donnés par d’autres pays, comme l’Allemagne, où les éleveurs touchent une prime par cochon arrivant avec la queue intacte à l’abattoir. »

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Devenue une préoccupation de société, grâce notamment aux vidéos des lanceurs d’alerte L214, les conditions de vie des animaux dans les élevages industriels devraient être abordées dans au moins un des premiers ateliers des EGA. Mais pour le CIWF « il ne faut pas que cela reste du cosmétique. Nous attendons des décisions engagées pour l’orientation des politiques publiques. » Celles-ci peuvent aussi agir auprès des consommateurs pour plus de transparence. Le CIWF demande ainsi « la mise en place de l’étiquetage du mode d’élevage pour toutes les viandes et produits laitiers, sur le modèle des œufs. »

Peut-on développer notre agriculture tout en respectant les habitats naturels ?

De manière plus indirecte, mais tout aussi importante, l’agriculture intensive a un impact sur la vie animale. Il s’agit même, en ce qui concerne les pays européens et d’Amérique du nord, de l’une des principales menaces pesant sur les espèces comme l’explique Florian Kirchner de l’UICN France. « Les grands champs uniformes et les fortes doses de pesticides sont extrêmement néfastes pour la nature. On supprime des haies et des bosquets, on comble des mares qui sont autant d’habitats naturels pour les oiseaux, les reptiles ou les insectes. Ce sont pour eux des zones-refuge très importantes. Le pélobate brun, par exemple, qui est le crapaud le plus menacé de France, doit en grande partie sa chute de population au comblement des mares, lieux de sa reproduction. »

L’alouette des champs est un autre cas emblématique. Cet oiseau se rencontre principalement dans les prairies et les zones cultivées. L’espèce a perdu, en France, 20% de ses effectifs en 15 ans … « L’alouette des champs reste un oiseau commun, mais elle est victime de l’intensification agricole et de l’utilisation abondante de pesticides et fera peut-être partie des espèces menacées de demain » met en garde Florian Kirchner.

Comment lutter contre les pesticides et la dégradation de la biodiversité ?

L’utilisation excessive des pesticides est l’autre grand problème généré par l’agriculture intensive. Les récentes études démontrant les effets catastrophiques de l’utilisation des néonicotinoïdes (en partie interdits en France à partir de 2018) sur les abeilles a notamment permis d’alerter le grand public sur ce sujet. L’Hexagone reste cependant l’un des pays européens utilisant le plus de pesticides. Les campagnes sont ainsi devenues de plus en plus hostiles à la faune sauvage, tandis que plusieurs espèces notamment d’oiseaux et de pollinisateurs se maintiennent dans les forêts et dans les villes. « Un comble » pour Florian Kirchner. 

« Nous savons ce qu’il faut faire pour améliorer l’agriculture et la faire entrer dans une logique de développement durable : c’est à dire un modèle qui nourrit sainement et suffisamment les populations, permet de faire vivre les agriculteurs, et respecte la nature. » Les EGA pourraient ainsi donner une occasion de repenser « une agriculture plus rentable, alliée à la nature et non pas développée contre elle.»  

Comment la pêche peut-elle respecter la préservation de l’environnement marin ?

La pêche, et plus exactement la pêche industrielle telle qu’elle est aujourd’hui pratiquée par plusieurs pays européens ne rentre pas dans ce modèle de développement durable. Cette question est d’autant plus difficile à gérer qu’elle ne dépend pas d’une seule volonté nationale mais de celle de plusieurs pays. C’est donc à l’échelle européenne que des initiatives contre la surpêche doivent être prise, ce qui ne doit pas empêcher la France d’aborder ce sujet lors des EGA.

« Les scientifiques doivent se battre chaque année sur l’instauration de quotas pour respecter les ressources en poissons des mers et des océans regrette Florian Kirchner. Pourtant on sait que lorsque ces restrictions sont respectées, elles sont bénéfiques : après 3 ans de quotas très bas concernant le thon rouge en Méditerranée, on constate que les populations commencent à se  reformer alors que l’espèce a failli disparaître en 2001. »

Comment organiser la cohabitation entre les Activités humaines et la présence de grands prédateurs ?

A travers ces différentes problématiques se dessine la question essentielle de la cohabitation entre les activités humaines et les animaux. En France, le retour de grands prédateurs sauvages, réintroduits par l’homme comme les ours, ou réapparus naturellement comme les loups, fait l’objet d’un débat virulent entre les éleveurs et les défenseurs de l’environnement. Ces derniers dénoncent la décision, qui vient d’être prise par le ministre de l’Ecologie Nicolas Hulot, d’autoriser l’abattage de 40 loups jusque en juin 2018.

Cependant, le ministre a assuré dans un communiqué que dans les prochains mois, l’ensemble du dispositif du plan loup sera revu.  « J’accorde une attention toute particulière aux travaux entre les éleveurs et les ONG afin de préparer un nouveau dispositif de gestion de  la présence des loups dans l’environnement à partir de 2018 », précise Nicolas Hulot. De son côté, l’association Cap Loup, tient à rappeler que « la biodiversité, l’intérêt général et le respect de la vie animale ne doivent pas être sacrifiés pour satisfaire des lobbies cynégétiques et agricoles qui refusent d’évoluer. » Reste à savoir si tous ces acteurs vont pouvoir se retrouver lors des Etats généraux de l’alimentation pour trouver de nouveaux accords. 

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Publié le 20 juillet 2017
6 minutes
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