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Les propriétaires ont peur de perdre le contrôle de leur chien

L’éducation canine est un secteur en pleine expansion en France. À croire que nous ne savons plus éduquer nos chiens alors que leur place au sein de notre foyer nécessite des rudiments d’éducation indispensables. Des éducateurs canins, au travers de leurs expériences et de leurs rencontres, jugent les propriétaires de chiens que nous sommes aujourd’hui… Mais ce n’est peut-être ni les chiens ni les maîtres qui ont changé, mais la pression urbaine et sociale qui exige du propriétaire le contrôle parfait de son animal…

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Les propriétaires ont peur de  perdre le contrôle de leur chien
Shutterstock

Ce qui a fondamentalement changé dans notre rapport au chien, c’est avant tout le rôle qu’on lui assigne à nos côtés. Du temps de nos grands-parents, les chiens étaient, pour la plupart, dédiés à une utilisation bien précise et formés dans ce but. Par exemple, tel chien était «dressé» pour la chasse, tel autre pour la garde, le déplacement du troupeau, la recherche des truffes… Certes, ils pouvaient aussi être des compagnons aimés, mais leur fonction première restait liée au rôle qu’on leur avait attribué. Souvent, ils vivaient dehors : à la niche, au chenil, à l’attache…

Aujourd’hui, le chien est devenu un compagnon de vie. Sa fonction utilitaire a quasiment disparu au profit de celle d’animal de compagnie – sauf, bien sûr, dans les cas précis où il est encore un chien de travail: chien d’assistance pour handicapés, chien d’avalanche, chien de décombres, chien de berger…
Comment le chien, devenu un membre de la famille à part entière, est-il géré au quotidien par son maître en terme de relation éducative? Qui mieux que les éducateurs canins pour observer le genre de propriétaires de chiens que nous sommes?

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 Le 16 octobre dernier, TF1 diffusait, dans son émission Sept à Huit, un reportage sur des éducateurs canins apportant à des propriétaires dépassés leurs solutions face à des chiens peureux, agressifs, voire mordeurs… Un sujet qui a suscité la colère de nombreux éducateurs, écœurés que l’image de la profession soit réduite à une seule et unique approche. Très clairement, des méthodes coercitives basées sur la violence, le rapport de force et le seul postulat «dominant/dominé», étaient mises en avant. Rien à voir avec la méthode positive défendue par les éducateurs, comportementalistes, éthologues et vétérinaires. D’ailleurs, l’Ordre national des vétérinaires a immédiatement réagi, dans un courrier cinglant à TF1, en qualifiant le reportage d’«inconséquent et dangereux».

Même si ce reportage ne reflète en rien la réalité de l’éducation canine en France, il met en lumière les limites et les échecs des propriétaires de chiens. C’est la parfaite illustration d’un malaise constaté dans la relation maître-chien, que l’éducateur canin Nicolas Cornier attribue à l’évolution de la société : «Sous la pression urbaine et sociale, le monde extérieur a changé et imposé une démarche très hygiéniste basée sur le contrôle, déplore-t-il. Aujourd’hui, la place, l’espace, le temps qu’on peut attribuer à un chien sont très réduits».

Les Français auraient-ils perdu le bon sens de leurs grands-parents en matière d’éducation canine? «Je pense que les gens ont encore ce bon sens, mais il est bloqué par la peur – de déranger, de perdre le contrôle de son chien, de le sortir sans laisse, etc. Quitte à l’électrocuter pour éviter qu’il gêne les voisins! Les gens paniquent dès que le chien disparaît de leur champ de vision. Depuis les années 1970-1980, un chien ne peut plus vagabonder: c’est une évolution très récente due à la loi, aux mentalités et au fait que le contrôle a envahi l’esprit humain.» Pour l’éducateur, c’est tout un rapport à l’animal qui est modifié: «Les gens n’accueillent pas un être vivant mais un concept, une image qu’ils se font du chien avec des adjectifs comme “beau” ou “gentil”, lesquels n’ont rien à voir avec la réalité – et cela est accentué par les réseaux sociaux. Les gens pensent comprendre leur chien mais ils n’ont aucune idée de ce qu’il est réellement. À titre d’exemple, 99% des gens qui sortent leur chien ne le font pas assez, et/ou pas bien».

Sommes-nous plus laxistes, moins sévères que nos aïeux? «Ce n’est pas une question de sévérité, estime Nicolas Cornier. Le problème vient surtout du fait qu’on oublie d’éduquer le jeune chien car on est dans l’émotion de son accueil, et qu’ensuite on est dépassé.»

Une éducation précoce : voilà le secret! «La structuration du cerveau s’effectue très tôt chez le chien, insiste l’éducateur canin. Dès son arrivée à la maison, il faut lui apprendre la frustration, la solitude, l’ennui, la socialisation…» Là encore, c’est le changement de rapport à l’animal qui est en cause. Le chien est traité comme un membre de la famille, voire un bébé à dorloter qu’on ne veut surtout pas contrarier de peur de perdre son affection – un peu comme avec un enfant-roi! «Les gens ont tendance à favoriser le bon comportement et ne savent plus contrarier le mauvais ­comportement, poursuit l’éducateur. Or c’est important de contrarier verbalement le chien, d’agir en “être contrariant”».

Décoder le chien

Régulièrement, un drame survenu suite à une morsure de chien fait la Une… À chaque fois, c’est l’incompréhension. «Les Français ne sont absolument pas conscients du danger potentiel que peut représenter un chien! déplore Chantal Hazard, comportementaliste et créatrice du Peccram (Programme d’éducation à la connaissance du chien et au risque d’accident par morsure). Ils sont ignorants du mode de communication de l’animal. Ils ne savent ni repérer ni décoder les signaux d’alerte qu’il envoie… La morsure survient toujours à cause d’une mauvaise lecture du chien, qui n’est quasiment jamais responsable. Si on éduque, on évite la morsure ! » Et les enfants sont au premier plan : «Une étude scientifique a démontré que, sans apprentissage, 50 à 65% des enfants de 3 à 5 ans ne font pas la différence entre un chien heureux et un chien stressé. Après éducation, la proportion tombe à 17%!» Lors des séminaires qu’elle organise, Chantal Hazard explique les dangers de l’anthropomorphisme: «Par exemple, tous les enfants ont appris à sourire de toutes leurs dents devant un appareil photo. Quand un chien montre ses dents, les enfants pensent que le chien sourit, et ne se méfient pas».Les adultes aussi sont concernés: «On est à 17% de méconnaissance sans apprentissage, et l’on tombe à 0% si l’on éduque! Le problème, c’est qu’il est plus difficile de faire comprendre aux adultes inconscients du problème, qu’ils doivent se former à l’éducation».

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