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La ville en liberté surveillée

Pour les chiens, la ville est souvent associée à la laisse. Peu d’endroits leur sont accessibles en liberté. Voire aucun. Une contrainte qui n’est pas sans conséquences sur leur comportement.

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La ville en liberté surveillée
Arnaud Beinat

Depuis trois ans, chaque rentrée de septembre est ponctuée par une manifestation canine dans la capitale. La revendication de ces maîtres qui sortent dans la rue avec leurs chiens ? Plus d’espaces pour leurs toutous, plus de liberté, plus d’intégration du chien dans la ville. « La question n’est pas prise au sérieux, soupire Christine d’Hautdhuille, porte-parole de l’association Mon chien, ma ville, à l’initiative de cette marche annuelle. Nous souhaitons sensibiliser les maires des arrondissements à ce problème, mais pour l’instant sans écho positif. » Pour se faire entendre, l’association a profité de l’appel à projets lancé via l’opération Paris budget participatif pour proposer une idée d’investissement pour la capitale. Ambitieuse, elle concerne l’ensemble des arrondissements qu’elle invite, pour un montant de 1,5 million d’euros (l’enveloppe allouée à Paris budget participatif est de 100 millions pour 2016), à créer un ensemble d’espaces clos pour que les chiens parisiens puissent se dépenser. L’association propose également de leur permettre d’accéder, en laisse, à tous les espaces publics.

Car, alors que Paris compterait 200 000 chiens, quasiment aucun parc ni jardin ne leur sont accessibles, même au bout d’une laisse. Il leur faut rejoindre, à pied car les transports publics leur sont également interdits, les bois de Boulogne et de Vincennes, situés à l’ouest et à l’est de la capitale. Une exception, pourtant, dans le 14e arrondissement où un premier parc canin a ouvert en janvier 2014. Mais ce premier pas encourageant n’a, pour l’instant, pas fait d’émules. 

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Les élus des plus grandes villes de France sont d’ailleurs si frileux sur la question de l’accessibilité des lieux publics aux chiens que c’est le critère qui a creusé l’écart entre elles, dans notre palmarès. Pourtant, la liberté de s’exprimer pour le chien, à la fois parmi ses congénères et au milieu des habitants, est un élément essentiel de son bon comportement dans le cadre de vie que l’homme lui propose. Lille l’a bien compris avec 18 parcs publics accessibles aux chiens sans laisse. Aucune autre ville de notre classement ne rivalise avec ce chiffre. Parfois, nos compagnons peuvent compter sur la générosité de certains donateurs comme à Marseille, où Henri Fabre, le défunt inventeur de l’hydravion, a légué en 1984 son terrain à la ville à la condition expresse que les chiens puissent venir s’y ébattre en toute liberté. 

Le caniparc : un compromis

Beaucoup de villes contournent le problème de la cohabitation au sein d’un même espace entre les chiens et les hommes en dédiant aux animaux des caniparcs. Exclusivement réservés aux chiens, accompagnés de leurs maîtres, ils les accueillent en liberté. Toulouse a été, en 2009, à l’initiative du premier espace clôturé pour les chiens. Aujourd’hui, elle en compte 34, un record, même si l’espace consacré peut paraître exigu (une moyenne de 150 mètres carrés). 

Pour Nicolas Cornier, éducateur canin qui connaît bien cette problématique des chiens en ville, ce type de site ne permet pas d’« aller vers le vivre ensemble. Cela n’encourage pas les maîtres à éduquer leurs chiens. Ils ne leur apprennent pas à ne pas courir après les vélos ou les joggeurs. » Pour ce professionnel, lâcher son chien ne permet pas seulement de le défouler. « En plus de se dépenser physiquement, l’animal se fatigue mentalement, explique-t-il. Il explore et résout des problèmes qui se trouvent sur son chemin. Il peut aussi rencontrer d’autres bipèdes que son maître et apprendre à ne pas les craindre. » Et le propriétaire est ainsi responsabilisé. « Au moment de le lâcher, le maître doit contrôler si l’environ-nement est sécurisé, et contenir l’excitation de son chien à qui il a enseigné les bases de l’éducation, comme le suivi, le rappel, le stop, les dangers de la rue et toutes les contraintes liées à la vie en société. » L’expert souligne toutefois qu’il faut savoir faire des compromis dans les grandes villes. Ces parcs exclusivement dédiés aux chiens contribuent à une meilleure connaissance de l’animal par son maître. « En le regardant agir, ce dernier identifie ce qui attire son chien et ce dont il se méfie. Il peut aussi avoir des contacts sociaux avec ses congénères, apprendre à parler chien, à ne pas agresser, à bien se comporter. » 

Pourtant, malgré les demandes des maîtres et des associations canines, les élus continuent de freiner des quatre fers pour autoriser l’accès aux espaces publics. Les mêmes questions reviennent : les maîtres sont-ils suffisamment responsables pour éduquer leurs chiens ? La cohabitation avec un chien est-elle sans danger ? Devant ces incertitudes, et au nom du principe de précaution, peu de politiques osent la tolérance…     S.H.

TROP PEU D’EXCEPTIONS DANS LES TRANSPORTS

 

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A. Beinat

En France, la réglementation permet aux seuls petits chiens portés dans un sac de transport et aux chiens d’assistance de monter dans les transports publics. Quelques villes font exception. À Grenoble, par exemple, les grands chiens sont autorisés muselés et en laisse, sauf s’ils sont catégorisés. À Saint-Étienne, les maîtres s’acquittent d’un billet et les agents de surveillance se réservent le droit de refuser l’accès.
À Lyon, une expérience avait été menée en 2010 par Geneviève Bernardin, chef de projet à la mission animalité urbaine de la communauté du Grand Lyon. « Nous avions délivré un passeport donnant accès aux transports à une soixantaine de chiens participant à l’étude “Recherche et action sur la présence du chien dans les transports”, détaille Geneviève Bernardin. L’objectif était d’accorder ce droit à tous les chiens, en raison des bienfaits qu’ils apportent par leur seule présence. » Le changement de direction aux transports a jeté ce projet aux oubliettes.…

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Publié le 19 avril 2016
Modifié le 8 décembre 2023
4 minutes
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