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Canada : vers la fin de la chasse aux phoques ?

Alors que la saison 2021 de la chasse aux phoques vient d’ouvrir, cette pratique, déjà en déclin, est davantage mise en difficulté par la crise sanitaire et le réchauffement climatique. Une bonne nouvelle pour le Fonds international pour la protection des animaux (IFAW) qui se bat depuis 50 ans pour interdire cette chasse d’un autre temps.

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Canada : vers la fin de la chasse aux phoques ?
Shutterstock

La saison 2021 de la chasse commerciale aux phoques a commencé le 8 avril, au Canada. Bien que les quotas de prises ne soient plus communiqués depuis 2017, on estime qu’ils restent inchangés. Ainsi, 400 000 phoques du Groenland, 60 000 phoques gris et 8 200 phoques à capuchon peuvent, en théorie, être tués. Fort heureusement, le caractère cruel, inutile et non durable de cette chasse fait qu’elle est de plus en plus critiquée par l’opinion publique et que la demande des produits issus de cette activité est en chute libre. « En 2019, 32 000 phoques, d’après les déclarations, ont été chassés, soit 8 % du quota, explique Céline Sissler-Bienvenu, Directrice France et Afrique francophone du Fonds international pour la protection des animaux (IFAW). 2020 a été une année particulière, car la chasse a été suspendue pour les jeunes phoques, mais maintenue pour les adultes. Il y a eu 395 prises déclarées sur l’île de Terre-Neuve et 2 115 sur les îles de la Madeleine. Ça n’avait jamais été aussi bas. » Par comparaison, plus de 300 000 phoques étaient tués tous les ans jusqu’au début des années 2000. Peut-on, dès lors, estimer que, comme pour la chasse à la baleine, cette pratique est vouée à mourir ? C’est en tout cas l’objectif visé par IFAW, qui mène depuis 1969 une campagne visant à mettre fin au massacre commercial des phoques.

En 2021, la baisse se poursuivra-t-elle ?

Comme chaque printemps, quelques semaines à peine après leur naissance, les bébés phoques du Groenland risquent d’être tués, principalement pour leur peau, destinée à l’industrie de la fourrure. Même si les chiffres risquent de remonter par rapport à 2020, on peut espérer que cette nouvelle saison fasse moins de victimes que 2019… En effet, la demande mondiale de produits dérivés du phoque est en forte baisse, et les protestations internationales continuent de s’élever contre la cruauté de cette chasse. Autre paramètre important : le réchauffement climatique. « La banquise est très mauvaise, cette année, fragile, mal formée, ce qui entraîne une grande mortalité des jeunes, qui se noient. Il y a déjà eu de tels épisodes par le passé, pendant lesquels 90 % des nouveaux-nés ont péri. Toutefois, les chasseurs vont sûrement se reporter sur les adultes, même si leur peau est moins prisée », commente Céline Sissler-Bienvenu.

Une chasse cruelle et injustifiée

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Cette activité « traditionnelle », se pratique seulement pendant quelques semaines. « En fait, c’est une chasse transitoire qui permet de faire un peu d’argent avant le début de la pêche au crabe », explique la directrice d’IFAW. Mais qui dit chasse traditionnelle, dit souvent méthodes violentes et cruelles.

Les phoques sont frappés à l’aide d’un hakapik, un long manche de bois surmonté d’une pointe métallique, ou tués par balles depuis des bateaux. Bien que les chasseurs suivent une formation « bien-être » pour pouvoir tuer le phoque correctement, et notamment s’assurer de sa mort cérébrale pour ne pas le laisser souffrir, la réalité sur le terrain est tout autre. « Ils sont sur un substrat qui glisse avec des animaux qui fuient, c’est beaucoup plus compliqué. On a filmé des parties de chasse où il n’y avait aucun respect des règles et où ils chargeaient les animaux encore vivants pour les dépecer comme ça », raconte tristement Céline Sissler-Bienvenu.

DR. Un hakapik

Pourtant, depuis 50 ans, le même argument est utilisé pour justifier cette chasse : l’explosion démographique des phoques qui, de ce fait, déciment les bancs de poissons, et particulièrement de morues. « Il n’y a aucune preuve scientifique que la population des phoques explose ! Au contraire, elle est stable, voire en diminution en raison du réchauffement climatique qui entraîne une surmortalité des jeunes, s’insurge la directrice d’IFAW. Les accuser de décimer les bancs de poissons est aussi aberrant, continue-t-elle. Alors, oui, ils mangent du poisson, mais une grande variété d’espèces. Ils ne s’attaquent pas à une espèce en particulier. Il a été largement démontré que c’était la surpêche qui vidait les mers… ». Céline Sissler-Bienvenu ajoute que ces arguments sont aussi utilisés chez nous, dans le nord de la France, où les pécheurs accusent les phoques de vider la Manche de ses poissons. « Il suffit de regarder les chalutiers, en fait… ». Fort heureusement, la population internationale n’est pas dupe, et les prises de conscience surviennent depuis les années 1980.

Les interdictions se succèdent

Première date marquante dans le déclin de cette pratique : 1983. Après de grandes campagnes médiatiques menées notamment par Brigitte Bardot et Paul McCartney, l’Europe a décidé d’interdire l’importation de produits provenant des blanchons – les nouveau-nés possédant une fourrure blanche magnifique – ce qui a permis de sauver plus d’un million de phoques du massacre au cours de la décennie suivante.

À lire aussi : Comment sauver le phoque moine ?

En 2009, l’Union européenne a franchi une étape supplémentaire en restreignant la mise sur le marché de tous les produits dérivés du phoque, à l’exception de ceux chassés par les populations autochtones. « Il existe actuellement 36 interdictions commerciales internationales concernant les produits dérivés du phoque dans le monde, incluant les 27 États membres de l’UE. On estime que la chasse commerciale a diminué de 90 % depuis l’entrée en vigueur des interdictions commerciales européennes, ce qui a permis de sauver près de quatre millions de bébés phoques », détaille IFAW dans un communiqué. Dès lors, le manque de rentabilité de cette chasse en accélère la fin…

Shutterstock. La chasse au blanchon est interdite au Canada depuis 1987

Un gouffre financier

Selon le ministère Pêches et Océans Canada, 92 % de la viande issue de la chasse est gaspillée. Pour maintenir cette pratique, le gouvernement a déboursé plus de 20 millions de dollars canadiens ces 5 dernières années alors qu’elle n’en a généré qu’à peine 9 millions. « À partir du moment où le gouvernement ne subventionnera plus, cette chasse ne pourra plus exister, affirme Céline Sissler-Bienvenu. C’est pourquoi IFAW continue de solliciter le gouvernement canadien et lui demande de diriger ses financements vers des approches plus écologiques, comme la traque des filets dérivants ou le plastique en mer. D’ailleurs, nous avons eu des histoires de chasseurs qui se sont reconvertis en nettoyeurs ! »

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