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À Mayotte, les tortues vivent l’enfer

C’est l’hécatombe. Depuis le début du confinement, et encore aujourd’hui, les tortues marines venues sur les plages de Mayotte pour pondre se font dépecer vivantes par des braconniers.

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À Mayotte, les tortues vivent l’enfer

Les plages, désertées par les touristes et sans surveillance, fournissent à ces criminels les animaux sur un plateau d’argent. Le but ? L’argent ! Chaque kilo de chair est vendu entre 40 et 60 euros sur le marché noir. Début Juillet, et face à cette situation terrible pour l’île française, la chambre d’appel de Mamoudzou a décidé de condamner deux braconniers, attrapés en avril dernier avec 65 kilos de viande de tortue fraîche, à la peine maximale : deux ans de prison ferme et 1 000 euros de dommages et intérêts. Malgré une décision exemplaire, pour l’association Sea Shepherd, la crise provoquée par le Covid-19 a réduit à néant les efforts réalisés depuis 4 ans pour enrayer la destruction de ces reptiles sur l’île.

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Lamya Essemlali, présidente de Sea Shepherd France

Animaux-Online : Où en est le braconnage des tortues à Mayotte ?

Lamya Essemlali : On a reçu encore récemment des signalements nous informant de dizaines de cadavres de tortues retrouvés sur les plages. Nous n’avons pas d’estimations précises mais ce qui est sûr, c’est que plusieurs centaines de ces animaux ont péri en quelques mois. Les carcasses retrouvées ne sont que la partie émergée de l’iceberg car les braconniers, souvent, les emportent avec eux ou les enterrent. Normalement, de juillet à octobre, Sea Shepherd patrouille toutes les nuits sur les plages, là, il n’y a plus rien. C’est reparti de plus belle et c’est très frustrant.

AO : Pourquoi vouloir la viande de cette espèce protégée et menacée ?

L. E. : Ici, ce n’est pas du tout un braconnage de subsistance. Les locaux qui veulent manger cueillent des fruits ou vont pêcher, même illégalement dans le lagon. Ils ne vont pas s’attaquer à un animal de 150 kilos. D’ailleurs, les locaux qui patrouillent avec nous pour protéger les tortues sont souvent très modestes, avec des habitations sans eau ni électricité. Là, c’est clairement pour l’appât du gain car la viande se vend très cher.

AO : Trois braconniers ont pour la première fois écopé de 2 ans de prison ferme. Êtes-vous satisfaite ?

L. E. : La peine, sur le papier, est satisfaisante mais, déjà, les braconniers sont en fuite. Au moins, ils ne sont pas près de remettre les pieds à Mayotte, c’est déjà ça. Mais c’est tout le réseau qu’il faut démanteler. Les acheteurs de cette viande sont des nantis, des personnes qui ont les moyens, et eux ne sont pas attrapés.

AO : Comment lutter contre ces pratiques ?

L. E. : Seule une présence permet de dissuader les braconniers, et ce n’est pas mis en place. L’État n’en a clairement rien à faire de cette espèce protégée d’intérêt prioritaire. Pourtant, ce n’est pas compliqué à organiser, il faut juste des moyens humains. D’ailleurs, nous avons prévu d’attaquer l’État pour son manque de volonté, comme nous l’avons fait pour le dauphin.

Sea Shepherd, aux côtés de 26 autres ONG, a porté plainte devant la Commission européenne contre l’État français et d’autres États européens qui ne mettent en œuvre aucune mesure pour empêche les captures « accidentelles » de dauphins. Et elle a obtenu gain de cause puisque, début juillet, la Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction à l’encontre de la France, de l’Espagne et de la Suède. Les gouvernements sont sommés de mettre en œuvre des mesures d’urgence afin de Comment agir pour la protection des mammifères marins ?.

À lire aussi : Pourquoi les tortues mangent-elles du plastique ? La science répond. 
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Publié le 22 août 2020
3 minutes
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