10 comportements félins qui interrogent

– Par le docteur Laetitia Barlerin, vétérinaire

1. Il me réveille la nuit

Vous pensez : « Il a faim. »
Il pense : « Fini la grasse mat ! »

Pas besoin de radio-réveil avec lui, sauf que vous ne pouvez pas programmer votre heure. C’est invariablement la sienne : 4 ou 5 heures du matin. Il se met à miauler, puis saute sur le lit et se frotte contre votre visage en ronronnant. Vous finissez par vous lever pour lui remplir sa gamelle. La vraie nature du chat est celle d’un prédateur solitaire et plutôt nocturne avec des pics d’activité au crépuscule et à l’aube. Ce sont des moments privilégiés de chasse où il y voit comme en plein jour alors que ses proies favorites, les rongeurs, sortent de leur cachette. Le petit matin correspond au moment où les oiseaux commencent à chanter dans le silence nocturne et sont plus facilement repérables. C’est pourquoi votre chat est en pleine forme à 5 heures du matin alors qu’il roupille toute la journée. Il a envie de chasser, de sortir, de jouer, de manger, et ne comprend pas que vous soyez encore dans les bras de Morphée. 
Pour des nuits complètes, fermez la porte de votre chambre, jouez longtemps avec lui le soir avant de vous coucher et mettez à sa disposition un jouet distributeur de croquettes pour qu’il s’occupe pendant votre sommeil.

2. Il se couche sur mon ordinateur

Vous pensez : « Il ne supporte pas que je travaille. »
Il pense : « On est bien au chaud. »

Il suffit que vous veniez pianoter sur votre ordinateur pour qu’il saute sur le bureau, se frotte contre vous, puis s’allonge nonchalamment sur le clavier ou les documents étalés, les yeux mi-clos. De la provocation pour vous empêcher de travailler et vous forcer à vous intéresser à lui ? Il n’en est rien. Selon lui, c’est le meilleur spot de repos de la maison : il y trouve la chaleur (celle de la lampe de bureau, de l’ordinateur), la tranquillité (nécessaire à votre travail) et l’attention d’une personne qui lui parle ou le caresse. Et le bruissement des feuilles sous ses pas est amusant. 
Le mieux est de lui installer un coussin moelleux sur un coin du bureau et sous la lampe. La présence d’un chat favorise la concentration et la créativité, c’est prouvé !

3. Il pétrit mes genoux

Vous pensez : « Ouille ! »
Il pense : « Je me sens bien avec toi. »

Tous les soirs, c’est le même rituel. Vous vous installez sur le canapé et il grimpe aussitôt sur vos genoux pour venir malaxer votre pull, votre pantalon ou votre jupe tout en ronronnant. L’instant aurait pu être agréable s’il n’avait pas la fâcheuse et douloureuse manie de pétrir en sortant et rentrant ses griffes. Aïe ! Pourtant, il veut juste vous dire qu’il est bien avec vous et qu’il se détend. Car ce comportement insolite est à rapprocher de celui du chaton qui tête la mamelle de sa mère et la « pétrit » pour favoriser la montée de lait. Comme un retour à l’enfance déclenché par votre présence, le contact avec des tissus moelleux et agréables (tels que la peau de sa mère ?) est un bien-être. 
Ne le repoussez surtout pas mais pensez à lui couper les griffes et à glisser un plaid sur vos genoux. 

4. Il se glisse dans les cartons et sacs que je rapporte

Vous pensez : « Il est vraiment bizarre. »
Il pense : « Je m’éclate ! »

Il a la « carton-mania » : quand vous rapportez un colis à la maison, il attend qu’il soit vide pour se glisser dedans et jouer à poursuivre une souris invisible. Les sacs en plastique lui font le même effet, il y entre, tourne et retourne, puis en sort tel un bolide. Certains aiment même arracher le bord du carton ou mâchonner le plastique. Étrange… En fait, cartons et plastiques sont de formidables terrains de jeu pour lui. Plusieurs sens sont stimulés : le toucher (il aime le contact avec ces matières et les glissades sur le plastique), l’ouïe (le bruissement à leur contact l’excite), l’odorat (traces d’odeurs alimentaires ?). Il adore s’y cacher, observer les alentours sans être vu et donner un coup de patte sur toute chose qui passe à proximité. 
Des jeux pour chats très économiques, à consommer sans modération à condition de couper les anses des sacs et ôter les agrafes des cartons pour éviter les blessures.

© Shutterstock/Bombermoon

5. Il fait sa toilette dès que je le brosse ou le caresse

Vous pensez : « Il est vexant. »
Il pense : « Je me calme. »

Admettez qu’il est désarmant quand il lui arrive de se lécher avec frénésie le pelage que vous venez de caresser ou de peigner. Comme si une odeur (votre odeur !) le gênait. Trois explications sont possibles selon son humeur. Soit il veut analyser l’odeur que votre main ou la brosse a laissée sur sa peau (traces olfactives alimentaires, de cosmétique…) et en même temps remettre ses poils en place. Soit la stimulation épidermique proche d’un massage a déclenché chez lui par réflexe une séance de toilettage. Soit enfin, s’il apprécie peu le contact physique, il est contrarié et son léchage frénétique lui permet de s’apaiser et de calmer sa tension interne. Si sa queue bat la cadence, cette dernière hypothèse est la plus probable. 
La prochaine fois, attendez qu’il vienne de lui-même chercher un câlin.

6. Il cligne des yeux quand je cligne des yeux

Vous pensez : « Il me fait un clin d’œil. »
Il pense : « Peace and love. »

Vous regardez votre chat avec amour et… il détourne la tête. Mais si vous clignez des yeux en le regardant, il fait de même. Est-ce du mimétisme ? Nous nous méfions du regard noir et des sourcils froncés d’une personne à l’évidence en colère ? Les chats communiquent aussi avec leur regard, qui dévoile leurs sentiments et leurs intentions. Ainsi, un chat qui veut mettre à distance un congénère ayant fait irruption sur son territoire le fixe du regard, pupille contractée et poil hérissé (attitude offensive). A contrario, une pupille dilatée (« œil noir ») et des oreilles collées en arrière indiquent la peur d’un chat acculé qui ne peut pas fuir mais est prêt à attaquer (attitude défensive). Ainsi, fixer du regard un chat est, en langage félin, un signe de menace. Pour désamorcer le conflit, il détourne le regard. C’est pourquoi, instinctivement, il fuit notre regard quand nous le regardons. 
Pour le rassurer sur nos intentions, il suffit de cligner des yeux, il répondra par un clignement ou en plissant les yeux pour indiquer qu’il a compris l’échange pacifique. C’est ainsi que se « parlent » à distance deux chats amis.

7. Il fait tomber les objets de mon bureau

Vous pensez : « Il veut m’embêter. »
Il pense : « Si on jouait ? »

Stylos, trombones, gomme, portable… Quel malin plaisir a-t-il, alors que vous êtes concentré sur votre travail, à venir pousser de la patte les objets présents sur le bureau pour les envoyer dans le vide ? Même si vous avez l’impression que votre chat passe ses journées à dormir (seize heures en moyenne tout de même), pendant ses phases d’éveil, il a besoin d’activités, de jeux, de chasse mais aussi d’interactions. Dehors, il peut s’amuser avec des herbes qui bougent au vent ou des papillons. À l’intérieur où tout est figé, il cherche à s’occuper. Faire tomber des objets est rigolo, d’autant que vous réagissez en râlant. Il obtient votre attention, ce qui renforce son comportement. Il s’occupe et en plus on s’occupe de lui, que demander de plus ? 
Prenez son geste comme un appel au contact et au jeu, faites une pause et lancez-lui une mini-balle, un élastique pour engager une partie. N’attendez pas qu’il vous le demande et obligez-vous à jouer avec lui au moins matin et soir.

8. Il approche son nez du mien

Vous pensez : « Il n’aime pas l’odeur de ma crème hydratante. »
Il pense : « Bonjour. »

Quand il est à hauteur de votre visage, il aime approcher délicatement sa truffe de votre nez comme intrigué. Une odeur suspecte ? Pas du tout, il veut juste vous saluer amicalement. Quand deux chats amis ou pacifiques se rencontrent, ils se font du nez à nez en se touchant. Ils se saluent ainsi mais échangent également des informations olfactives. Chacun vérifie que le congénère est bien une connaissance ou qu’il fait partie du même groupe. L’odeur individuelle captée est une sorte de CV qui renseigne sur l’identité, le sexe, l’âge et sûrement l’origine, les endroits où il est passé, la maison où il habite. Il arrive qu’après ce « baiser esquimau », l’un des deux protagonistes recule brutalement et crache sur l’autre, probablement parce qu’il s’est rendu compte qu’il avait affaire à un étranger.
Le chat vit dans un monde d’odeurs, ne l’oublions pas !

© Shutterstock/PhotoSunny

9. Il réclame sans cesse à manger

Vous pensez : « C’est un goinfre. »
Il pense : « Occupe-toi de moi. »

À peine avez-vous mis un pied dans la cuisine, que monsieur chat accourt et miaule avec insistance en se frottant à vos mollets. Vous lui servez sa pitance et, selon les jours, il l’engloutit ou il la refuse d’un air dégoûté en miaulant de plus belle. Le même scénario se répète à chaque fois que quelqu’un approche de cette pièce stratégique. Certains chats vivent pour manger (et non le contraire). La boulimie est alors signe de maladie (comme le début d’un diabète) ou de mal-être (il mange pour s’apaiser). Mais chez la plupart des chats, le « miaulement du chat affamé » est juste une demande d’attention qui s’est ritualisée. Si un chat miaule, c’est d’abord pour prendre contact. Nous l’interprétons trop rapidement comme une expression de la faim (tel un bébé qui pleure) et nous lui donnons à manger… Une récompense qui renforce le comportement du chat ! Si bien qu’ensuite ce dernier peut miauler sans avoir faim, juste pour que l’on s’occupe de lui. Il a associé la cuisine à une interaction positive avec vous (et secondairement à une friandise fraîche). 
Donc, s’il miaule, répondez « à côté » par des paroles, des caresses, un jeu, et occupez-vous de lui plus souvent.

10. Il se lèche après avoir raté un oiseau

Vous pensez : « Il a honte. »
Il pense : « Je me calme. »

Dans le jardin, il a un oiseau en ligne de mire, il approche à pas feutrés, rasant le sol, en se cachant dans les herbes. Il s’arrête puis bondit sur sa proie… qui s’échappe in extremis. Piteux, il entame avec frénésie une séance de toilettage comme si de rien n’était… L’envie pressante de se toiletter après une action ratée de chasse peut paraître incongrue. Pourtant la raison est… hormonale. La toilette est l’une des activités favorites du chat, il y passe deux à quatre heures par jour. Sa fonction n’est pas seulement hygiénique. Prendre contact avec son corps l’apaise. La stimulation cutanée déclencherait la production d’endorphines, des hormones antalgiques qui procurent un bien-être. 
Le léchage calme donc les tensions émotionnelles comme celles liées à une frustration après une prise manquée. Il lui permet de revenir à un équilibre émotionnel indispensable pour reprendre la chasse. Rien à voir avec une quelconque honte qu’il pourrait éprouver.

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