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D’Joe et Sarah : l’aventure australienne

C’est en 2002, alors qu’elle arpentait l’Australie à pied et en solitaire, que Sarah Marquis fait la rencontre de D’Joe. Ensemble, ils parcourront 10 000 kilomètres, supportant la faim, la soif et la chaleur. Elle vivra avec lui une aventure hors du commun, prouvant, une fois de plus, que le chien est le meilleur ami de l’homme.

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D’Joe et Sarah : l’aventure australienne
Joël Marquis

Sarah Marquis a franchi la distance de 14 000 kilomètres à pied à travers l’Australie. C’était en 2002, soit la toute première expédition de la célèbre baroudeuse. Seule ? Pas tant que ça. Alors qu’elle avait déjà cheminé durant 4 000 kilomètres, Sarah a fait une rencontre plutôt inattendue… « J’étais sur une chaîne de montagnes qui s’étend du nord au sud de l’Australie et j’ai très vite constaté qu’il n’y avait pas de point d’eau. Un soir, je suis donc descendue pour en chercher, et je suis arrivée derrière une vieille ferme », raconte-t-elle. Après avoir ouvert un portail rouillé, un homme plutôt étrange se dirige vers elle. « Qu’est-ce tu fais là ? », lui demande-t-il avec agressivité. « Je lui bredouille que je cherche de l’eau. Il me dit d’aller à l’arrière, de puiser mon eau et de ficher le camp. » Préférant ne pas s’éterniser en ces lieux hostiles, l’aventurière se dépêche d’aller puiser son précieux or bleu. Alors qu’elle remballe ses affaires, elle aperçoit un chien attaché très court à un arbre. « Il avait l’air terrorisé », se souvient-elle. Puis, elle remarque le fusil en bandoulière de l’homme qui lui a adressé la parole. Sarah comprend alors qu’il s’apprêtait à abattre l’animal juste avant qu’elle n’arrive. Apparemment, ce chien, censé rassembler le bétail, ne donnait pas satisfaction dans son travail. « Et là, sans trop réfléchir, j’ai volé le chien et je suis partie en courant. J’ai entendu l’homme crier : “Tu n’auras que des problèmes avec D’Joe !” C’est comme ça que j’ai su son nom. »

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Une grosse logistique

« Au début, cela a été difficile d’avoir un chien parce que c’est une grosse logistique. J’étais responsable d’une vie. Je n’avais pas réfléchi : il était juste hors de question que quelqu’un le fusille sous mes yeux », admet Sarah Marquis. Mais, très vite, les deux compagnons de route s’apprivoisent. Pour commencer, la baroudeuse lui fabrique son propre sac à dos afin qu’il porte son eau et sa nourriture. « C’était le deal », explique-t-elle. Plus tard, elle lui confectionne des chaussures pour protéger ses pattes du sable brûlant. Dès qu’elle a pu, Sarah a emmené D’Joe chez le vétérinaire pour vérifier qu’il était en bonne santé, connaître son âge, le faire vermifuger, etc. Le praticien lui a alors expliqué qu’elle avait un chien exceptionnel : un croisement entre un dingo et un bouvier australien. « Ils viennent spécifiquement de la région du Queensland. C’est ce croisement qui fait que ce chien a 2 % de folie. Il a ce côté à la fois sauvage et rigolo. » 

Joël Marquis. D’Joe porte son propre sac à dos et ses pattes sont protégées du sable brûlant par des chaussons.

 Le don de la faire rire

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Ces deux personnalités, Sarah en a été témoin pendant les longs mois de marche où ils ont vécu côte à côte. Très intelligent, D’Joe avait le don de la faire rire. « Il aimait faire des bêtises pour que je rigole. Il m’a toujours boostée un maximum », se remémore-t-elle avec émotion. Elle se rappelle également son rituel : à chaque lever et coucher du soleil, il s’éloignait du campement, à 300 ou 400 mètres, et restait un quart d’heure à contempler l’horizon… L’expérience qu’ils ont partagée pendant 10 000 kilomètres a permis à ces deux aventuriers de se connaître sur le bout des doigts (ou des griffes). « Ensemble, on a eu faim, on a eu soif. Pourtant, jamais il ne m’a demandé à manger quand il voyait que je revenais bredouille de la chasse. Après, il faut s’imaginer aussi qu’il y a l’ambiance du camp, il y a les oiseaux, il y a les kookaburras (ou martin-chasseur géant, ndlr) qui chantent le soir… On vivait en communion avec la nature. » 

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D’Joe a en quelque sorte remboursé sa dette, en Australie, en sauvant la vie de Sarah à deux reprises. « La première fois, on était pris dans un feu de forêt qui arrivait des deux côtés et par l’arrière. La seule échappatoire était une barre rocheuse », explique-t-elle. La jeune femme décide de glisser le long de cette paroi, presque à la verticale, avec son chien attaché à elle par une longue laisse. La pente étant trop abrupte, la descente se transforme rapidement en chute. « On a commencé à faire une sorte de roulé-boulé avec des coups qui venaient de tous les côtés. Heureusement, un petit arbre avait décidé de pousser au milieu de ce mur rocailleux et nous a stoppés net. » D’Joe s’est retrouvé suspendu d’un côté de l’arbre et Sarah de l’autre. Après quoi, ils ont réussi à descendre et à s’en sortir avec seulement des contusions et quelques égratignures. « Sans D’Joe, je ne sais pas comment je serais arrivée en bas. »

La seconde fois, c’était lors d’une confrontation avec des chasseurs australiens à la « gâchette facile ». La seule présence de D’Joe a suffi à les calmer. « L’Australie, c’est un peu le Far West », décrit-elle. Au fur et à mesure de ses rencontres, Sarah a d’ailleurs remarqué un comportement récurrent chez son fidèle compagnon : « Chaque fois que l’on rencontrait des gens un peu louches, D’Joe venait s’asseoir sur mes pieds et les regardait droit dans les yeux. Quand il faisait ça, je savais que c’était tendu et qu’il ne fallait pas que je m’attarde. »

Joël Marquis. À chaque étape, Joël, le frère de Sarah lui apportait vivres et soutien.

LA LIGNE D’ARRIVÉE

Au bout de dix-sept mois de marche, Sarah franchit la ligne d’arrivée avec D’Joe. « Une fois l’aventure terminée, il a fallu le ramener en Suisse, mais c’était très compliqué et je n’avais plus d’argent », raconte-t-elle. En effet, entre son billet d’avion, la quarantaine et le vétérinaire, les frais pour rapatrier D’Joe s’élevaient à 5 000 francs suisses (4 500 euros environ). Elle décide alors d’écrire un article dans un média local. « Toutes les personnes qui avaient suivi l’histoire de D’Joe se sont mobilisées. Même des enfants ont cassé leur tirelire pour me donner 5 euros. » La somme a été récoltée en un temps record et Sarah a pu retrouver son chien à l’aéroport, un mois plus tard. « Nous n’avions jamais été séparés. Il avait cru que je l’avais abandonné. Dès qu’il est sorti de sa cage, il est venu mordiller mon bras avec un regard qui disait : “Ne refais plus jamais ça !” »

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Une nouvelle vie

D’Joe débute alors une nouvelle vie avec celle qui l’a sauvé de la mort, dans les Alpes du Sud, où vit Sarah. Durant sept années encore, D’Joe accompagnera Sarah (selon le vétérinaire australien, il avait 7 ans lors de leur rencontre). « Je ne regrette rien, j’ai été une meilleure humaine avec D’Joe que sans lui. C’est le plus beau compagnon que j’aurais pu espérer trouver dans une aventure pareille. C’était un caractère bien trempé, une personne unique. » Longtemps surnommée « la dame au chien », Sarah ne pensait pas retrouver la même relation avec un autre animal. Pourtant, en 2015, l’aventurière au grand cœur croise la route de chiots en Thaïlande, qui allaient servir de nourriture aux moines. Elle les sauve de ce destin funeste, comme elle l’avait fait pour D’Joe. « Sur cette portée de sept chiens, il en reste un que je vais rapatrier en Suisse. Qui sait, c’est peut-être le début d’une nouvelle aventure… » 

Sarah Marquis a raconté son aventure en Australie dans son livre, L’Aventurière des sables (Michel Lafon).

 

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