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Comment protéger les mineurs des violences faites aux animaux ?

Exposer les plus jeunes d’entre nous à la violence, notamment celle faite aux animaux, a-t-il des conséquences sur leur comportement futur ? Des réponses ont été apportées lors du colloque international sur ‘La protection de l’enfance contre toutes les formes de violences’ organisé, le 17 octobre dernier,  par la députée Samantha Cazebonne qui a déposé un projet de loi visant à interdire l’accès aux corridas aux moins de 16 ans.

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Comment protéger les mineurs des violences faites aux animaux ?
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Pas moins de 40 personnalités ont signé une tribune contre l’interdiction de la corrida aux mineurs. La raison ? Ce spectacle que la majorité des Français trouve sanguinaire est un art. Et à ce titre, il doit être accessible aux plus jeunes. Pourtant, de nombreuses études prouvent que l’exposition des plus jeunes à des scènes de violence, notamment exercée sur des animaux, est une cause de violence chez ces mêmes enfants devenus adultes.

C’est d’ailleurs pour les protéger de cette violence future que la députée LREM Samantha Cazebonne a déposé une proposition de loi visant à interdire aux moins de 16 ans l’accès à des corridas et des combats de coqs, lors du colloque international qu’elle avait organisé à l’Assemblée nationale sur ‘La protection de l’enfance contre toutes les formes de violences » .

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En installant le débat sur la protection de l’enfance et non pas sur le bien-être animal, la députée des Français à l’étranger entend sortir des polémiques qui apparaissent systématiquement dès qu’est posée la question des tortures faites aux animaux lors de « spectacles » autorisés par la loi.

Pourtant, une partie importante de cette journée de présentations et débats a concerné la violence faite aux animaux qui est un danger pour les plus jeunes qui y sont exposés, notamment à travers des spectacles.

Une violence d’abord virtuelle

C’est le moine bouddhiste tibétain et généticien Matthieu Ricard qui a ouvert cette session en précisant que la violence humaine n’avait pas de stimulation interne qui la justifierait : « Le mal pour le mal n’existe pas, a-t-il commencé, cela n’existe que dans les films d’horreur. Les agressions, meurtres et actes de violence ont toujours une justification selon les psychologues même si elle est blâmable. » Pour cet apôtre de la non violence, c’est une distorsion de la réalité qui affecte les enfants, notamment par rapport à la violence. « Un adulte de 20 ans aura assisté dans sa courte vie à au moins 4000 morts violentes en regardant la télé ou jouant à des jeux vidéos. C’est bien plus que dans la réalité ! » a-t-il déclaré, en précisant qu’il n’existait aucune protection des mineurs contre ces violences virtuelles. Ces expositions agissent sur de jeunes cerveaux non matures comme autant de séances de désensibilisation qui banalisent l’acte de violence. Et si, pour le moine, on ne peut pas interdire la télévision, on peut au moins y prévoir des programmes qui « exposent » à la non-violence. « La non-violence est très présente dans la culture bouddhiste tibétaine dès le plus jeune âge où les enfants sont très empathiques avec les animaux. »

Shutterstock. La télé et les jeux vidéos banalisent la violence auprès des jeunes enfants.

Pour Martin Esteban, membre du Conseil indépendant de la protection de l’enfance, les jeunes enfants aiment spontanément les animaux. « La preuve, c’est que si vous leur donnez une pomme et un rat ou un lapin, ils vont manger la pomme et jouer avec le lapin ou le rat. Mais si vous faites la même chose avec un jeune tigre, celui-ci va manger le lapin et jouer avec le fruit ! » a-t-il ajouté en guise de démonstration. Pour cet expert, la transmission de la violence s’opère généralement au sein de la cellule familiale, soit parce qu’elle s’exerce sur ses membres (le mari violent avec la femme, avec l’enfant, avec les animaux, et/ou la femme avec l’enfant…) ou qu’elle est liée à un endoctrinement. Ce dernier trouve souvent sa place dans un groupe (familial ou social) qui la pratique et la transmet comme une valeur et un signe d’appartenance. C’est le cas notamment de la tauromachie ou des combats de coqs qui se pratiquent dans un cercle fermé. Inviter les plus jeunes à assister à ces spectacles de cruauté envers les animaux est associé à une initiation nécessaire pour appartenir au « clan ». Une sorte de rituel auquel on est d’abord témoin, pour être plus tard pour certains des acteurs via les écoles de tauromachie par exemple.

Jean-Paul Richier, psychiatre et membre du Protec (Protégeons les enfants des corridas), a rappelé que la France autorise la corrida dans une dizaine de départements du sud qui bénéficient d’une exception dans le code pénal au titre de la tradition séculaire ! Pour ce spécialiste de l’enfance, les conséquences de la corrida sur les plus jeunes vont des cris, aux pleurs, et aux chocs traumatiques pour les plus fragiles. La distanciation qui est imposée devant la souffrance de la bête « rend difficile l’élaboration des émotions plus tard pour le jeune qui a été soumis à cette violence », explique-t-il. Avant de poursuivre que « l’accoutumance ou pire l’incitation à la violence peut se muer en fascination, voire en addiction ». C’est peut-être à ce sentiment de fascination qu’a fait allusion Pierre Arditi, dans l’émission C à Vous, quand il a déclaré à Elisabeth Lemoine pour défendre la corrida : « « J’ai vu de la corrida pour la première fois à 14 ans. Je suis désolé, j’ai trouvé ça extraordinaire. Ça a remué chez moi des choses étranges… » pour justifier plus loin dans l’interview que « la corrida est un art et nul ne doit en être exclu ».

Une opinion que ne partagent évidemment pas les opposants à la corrida qui réclament, si ce n’est son abolition (qui semble de toute façon inéluctable) au moins l’interdiction de l’accès aux arènes aux mineurs, pour les protéger des dangers auxquels ils sont exposés. Et surtout de mettre un terme à une forme de complicité des régions où se pratique cette discipline qui subventionnent des écoles tauromachiques pour former des jeunes mineurs. Certaines autorités locales autorisent même ces centres de formation (il existe 6 écoles tauromachiques en France) à venir dans des écoles faire du prosélytisme et l’entrée aux arènes est souvent gratuite pour les plus jeunes afin d’assurer un recrutement pour l’avenir.

Shutterstock. Spontanément, l’enfant éprouve de l’empathie pour les animaux. C’est plus tard que cela se gâte, notamment si il a été exposé à des violences faites aux animaux.

Pour David Joly, trésorier de la Flac (Fédération des luttes pour l’abolition des corridas), notre pays est en totale contradiction avec ses engagements puisque « la France est signataire de la Convention des Droits de l’enfant depuis sa création il y a 30 ans. Le comité des droits de l’enfant des Nations Unis s’est prononcé, en 2016, contre l’accès des mineurs aux corridas en France en tant que spectateurs et acteurs », a-t-il exposé au terme de son intervention.

De son côté, la Fondation 30 Millions d’Amis, consciente que la compassion pour les animaux naît au plus jeune âge et doit être préservée, a contribué à l’élaboration d’un livret pédagogique afin de sensibiliser les enfants des écoles primaires à la protection des animaux. Une éducation qui permettrait d’entretenir cette empathie spontanée pour le règne animal mais aussi d’apprendre les bons comportements pour ne pas nuire au bien-être et à la santé des animaux.

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