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Tics et tocs : des signes de mal-être

Tourner en rond, attraper sa queue, gober les mouches… quand il n’y a pas de mouches: les animaux perdent parfois la boule! Bien souvent, ces comportements anormaux sont le signe d’une souffrance liée à un mode de vie inapproprié.

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Tics et tocs : des signes de mal-être
Shutterstock

Les spécialistes parlent de « stéréotypie » quand ils ont à faire à un fauve qui tourne en rond derrière les grilles de son enclos sans marquer la moindre pause. Abondamment décrits quand ils concernent les animaux sauvages vivant en captivité, ces « comportements répétitifs, invariants et qui n’ont aucun but ou fonction apparents » (Mason, 1991) prennent des formes différentes selon les espèces qu’ils affectent. Chez l’éléphant, ce sera une « danse » d’un antérieur sur l’autre, chez l’ours, c’est la tête qui se balancera ou hochera durant des heures, certaines panthères arpentent leur enclos toute la journée, poussant la répétition jusqu’à poser leurs pattes sur la même empreinte à chaque nouveau tour qu’elles effectuent. Plus proches de nous, les perroquets atteints de stéréotypie se toilettent plus de dix heures par jour créant, par ces soins inlassables et sur le ventre surtout, des zones entières de dépilation qui mènent invariablement leur maître chez le vétérinaire. Dans les centres équestres, les chevaux développent eux aussi ces comportements anormaux et répétitifs en se balançant d’un antérieur sur l’autre (on dit qu’ils tiquent à l’ours) ou en appuyant leur mâchoire supérieure sur un support pour avaler de l’air… sans que cela prenne fin (on dit alors qu’ils tiquent à l’air). Parce qu’ils ne se produisent pas quand les animaux vivent à l’état naturel, ou en tout cas pas de cette manière inappropriée, compulsive et répétitive, ces comportements sont considérés comme révélateurs d’un état de mal-être chez les animaux qui en sont affectés. Soit parce qu’ils surgissent dans des situations de stress chez l’animal, de frustration ou dans des environnements qui ne lui permettent pas d’exprimer les comportements propres à son espèce comme chasser, se baigner, rechercher de la nourriture, un partenaire sexuel, jouer, etc.

Un environnement adéquat

Conscientes du problème et surtout des conséquences sur le comportement et l’équilibre émotionnel des animaux dont elles ont la charge, de nombreuses structures accueillant des animaux sauvages ont opté pour un enrichissement de l’environnement. Cela consiste à proposer à leurs pensionnaires une nouvelle manière de prendre la nourriture (plus ludique, nécessitant plus de temps et de réflexion), des jouets, des échanges plus nombreux avec d’autres membres de leur espèce ou des activités avec les soigneurs…

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Nos animaux de compagnie sont loin d’être épargnés par ces comportements répétitifs. Pour eux, les spécialistes parlent plus volontiers de troubles obsessionnels compulsifs (TOC) qui affectent également notre propre espèce humaine. Sans doute la proximité de ces animaux leur a-t-elle valu qu’on parle de leurs troubles comme des nôtres… Qui n’a pas observé chez certains chiens l’interminable « ronde » qu’ils font en « chassant » leur queue ? Avant de s’en inquiéter, beaucoup en rient, mais le trouble est bel et bien présent. Chez d’autres chiens, le toc consistera à gober les mouches alors qu’il n’y en a aucune dans la pièce, ou alors à se « sucer » les flancs à la recherche d’un hypothétique parasite… 

Certains chiens passent également des heures à se lécher les pattes, à se mordiller, allant jusqu’à se blesser ou à se mutiler. Les troubles compulsifs peuvent aussi amener le chien à adopter des comportements d’ingestion mais avec des objets inappropriés. Il va ainsi mâcher ou avaler des tissus, sous-vêtements, chaussettes… Chez le chat, le toc s’exprimera dans un toilettage excessif, aboutissant à une dépilation et/ou à des automutilations, ou dans des attaques d’objets insolites. En réalité, l’éventail des troubles chez nos amis à quatre pattes est très large. Mais pour être qualifié de toc, il faut qu’il survienne dans un contexte bien précis. Car chasser des mouches quand il y a des mouches n’est pas un toc ! Mais cela le devient quand la situation ne le requiert pas. Il faut aussi que la fréquence et la durée de ce comportement soient anormales, en tout cas bien supérieures et disproportionnées par rapport au but recherché. Enfin, un toc est aussi et surtout un obstacle à une vie normale, car l’animal enfermé dans ses troubles du comportement n’est plus en capacité d’interagir avec son environnement.

À chaque race, son toc

Fotolia Un chien qui affiche un comportement stéréotypé doit être impérativement vu par un vétérinaire.

Certains comportements compulsifs sont spécifiques à une race plutôt qu’à une autre. Par exemple, le berger allemand chasse plus volontiers sa queue tandis que le bull terrier est pris de tournis alors que le doberman est réputé « suceur de flancs ». Les cavaliers King Charles, quant à eux, gobent des mouches. Ces spécificités trouvent leur source dans la sélection de certains groupes de races canines qui ont été façonnés pour accomplir des fonctions précises avec des aptitudes comportementales qui leur sont propres.

Ainsi des chiens d’arrêt comme les braques peuvent présenter, dans des environnements trop peu stimulants, des troubles au cours desquels ils se figent « à l’arrêt » pendant des heures devant une ombre, un reflet, etc. Ils expriment de manière inappropriée un comportement qui, lui, est naturel. Toutefois, quand son animal adopte des comportements répétitifs, de nombreuses raisons médicales sont à exclure avant de pouvoir évoquer un toc. Les dermatoses entraînant des démangeaisons (parasites, allergies…) doivent être systématiquement explorées par le vétérinaire devant un chat qui s’arrache les poils de manière « compulsive ».

Près de deux chiens sur trois souffrant de Pica présentent des troubles digestifs (gastrites, reflux oesophagien, insuffisance hépatique…). Des hypothèses métaboliques (diabète, insuffisance hépatique ou rénale…) sont recherchées quand un animal se met à absorber cinq à dix fois sa ration d’eau journalière avant de pointer du doigt une potomanie (le fait de boire trop d’eau). Enfin, de nombreux troubles obsessionnels sont à relier à des problèmes neurologiques. Les lignées de bull terriers tourneurs ont ainsi une prédisposition aux crises épileptiques partielles qui participent au déclenchement de ces comportements compulsifs. On suspecte la même chose chez les dobermans qui se sucent les flancs à se blesser. Enfin, les cavaliers King Charles qui gobent les mouches ou se grattent le cou de manière obsessionnelle peuvent souffrir de syringomyélie, une maladie comprimant les structures neurologiques de la base du crâne. Mais en parallèle d’une démarche médicale, visant à cerner les causes des comportements anormaux, il n’est pas inutile de revoir le cadre de vie que l’on offre à son animal, la part du temps que nous lui consacrons ainsi que les dépenses physiques, mentales et sociales que nous lui proposons. Bien souvent, en revisitant son milieu de vie, nous pouvons améliorer les choses…

Les cochons d’élevage touchés eux aussi

Les comportements répétitifs existent également chez les animaux d’élevage. Notamment ceux élevés en batterie, enfermés toute leur vie, privés de contacts avec leurs congénères ou de la possibilité d’exprimer des comportements normaux. C’est le cas, en particulier, chez les cochons car ils sont fréquemment élevés dans des exploitations intensives où les truies sont entravées. Elles passent alors leur temps à mâcher les barreaux de leur cage ou dans le vide (sham-chewing). Ce comportement n’existe pas chez les cochons ayant un accès à l’extérieur.

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