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Maltraitance : les limites à l’interdiction de détention d’un animal

Les peines pour maltraitance animale peuvent être assorties d’une interdiction, parfois à vie, de détenir un animal. Si la mesure est essentielle pour lutter contre les atteintes faites aux animaux, elle comporte, en l’état, des limites dans son application.

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Maltraitance : les limites à l’interdiction de détention d’un animal
Shutterstock

La reconnaisse de l’animal en tant qu’« être vivant doué de sensibilité » a fait son apparition dans le Code civil en 2015. Cette avancée historique a fait progresser le droit des animaux, qui disposent également, depuis cette année, d’un Code réunissant l’ensemble des articles de loi les concernant. Ce Code de l’animal, élaboré à l’initiative de la Fondation 30 Millions d’amis, permet aux avocats et aux magistrats d’avoir un véritable outil pour défendre les animaux et faire appliquer la loi existante.

Car en matière de maltraitance animale, les sanctions*, prévues dans le Code pénal, ne sont pas toujours appliquées. Il reste même difficile de porter une affaire devant les tribunaux, comme le montre l’exemple du chat Cookie. Cependant, force est de constater que le sujet émerge, et que de plus en plus de cas d’animaux maltraités sont jugés et les auteurs de ces actes condamnés. « On observe une sensibilisation particulière des tribunaux à la cause animale », rapportent ainsi Xavier Bacquet et Maryse Bierna, avocats de la Fondation 30 Millions d’Amis.

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Plusieurs peines ont été prononcées cette année, allant de 5 mois de prison, dont quatre avec sursis, pour un habitant de Roubaix (Nord) ayant défenestré son chat, à 2 ans de prison ferme (peine maximale pour un acte de cruauté sur un animal) pour un adolescent de Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis). Âgé de 19 ans, il a battu et jeté son chien, Attila, du 3e étage, entraînant la mort de l’animal. Cette peine a été assortie d’une interdiction à vie pour le jeune homme de détenir un animal. « Seule cette peine doit assurer véritablement la protection des animaux », assurent Maîtres Xavier Bacquet et Maryse Bierna.

Aucun moyen de contrôle

Indispensable pour prévenir les risques de récidive, l’interdiction de détenir des animaux de compagnie est cependant une mesure dont l’application reste difficile à contrôler. Cette interdiction figure dans le casier judiciaire de la personne condamnée, casier auquel les autorités judiciaires et, dans une certaine mesure, les autorités administratives ont accès, détaille Blanche de Granvilliers, avocate et membre d’un groupe de travail sur le droit animal au barreau de Paris. Cependant, cette interdiction n’est inscrite à aucun autre endroit. Ainsi, dans les faits, « c’est seulement si le condamné ne respecte pas l’interdiction que les autorités en seront informées, dans le cas où une enquête serait menée », indique l’avocate.

Une interdiction loin d’être automatique

L’autre grande limite à cette interdiction est qu’elle ne concerne, le plus souvent, que des délits, c’est-à-dire des cas extrêmes de sévices et actes de cruauté sur des animaux, alors que pour de nombreuses infractions (des actes moins sévères), l’interdiction de détenir un animal ne peut pas être prononcée comme peine accessoire. « C’est le cas notamment pour les atteintes involontaires à la vie et à l’intégrité physique de l’animal (articles  654-1 et R. 655-1 du Code pénal) ou bien, concernant les animaux d’élevage, pour des cas de privation de nourriture ou d’abreuvage, de manque de soins ou de maintien dans un environnement inadapté (article R. 215-4, I du Code rural) », relève Blanche de Granvilliers.

Pour l’experte, ces lacunes s’expliquent par un manque d’harmonisation des textes. « Le législateur, lorsqu’il modifie les infractions relatives aux animaux, oublie l’existence de ces contraventions et ne stipule pas qu’une interdiction de détenir des animaux peut être prononcée dans ces différentes situations, alors même que cette interdiction paraît particulièrement adaptée aux auteurs de ces différentes infractions. »

À défaut de pouvoir légalement interdire à l’auteur d’une maltraitance de détenir des animaux, on peut solliciter la confiscation de l’animal-victime, dans le cas d’un particulier, ou bien d’obtenir la fermeture d’une entreprise si les faits de maltraitance se sont produits dans le cadre d’une activité professionnelle : animalerie, salon de toilettage, établissement de garde d’animaux, fourrière, refuge, élevage…

Les pistes d’amélioration

L’absence de fichiers ou d’autorité chargés de surveiller le respect de l’interdiction de détenir un animal diminue donc « de manière considérable l’intérêt de cette sanction », constate Blanche de Granvilliers. Ni les éleveurs ni les refuges n’ont les moyens de vérifier si une personne cherchant à acheter ou à adopter un animal se trouve sous le coup d’une telle interdiction.

Il serait donc nécessaire de pouvoir améliorer cette mesure, en s’inspirant par exemple d’un dispositif qui devrait prochainement être mis en place en Belgique : un permis obligatoire pour détenir un animal de compagnie. Ce permis sera octroyé à tous les citoyens, automatiquement et sans formalité. Il sera en revanche retiré à toute personne reconnue coupable de maltraitance animale. Une base de données permettant de recenser les personnes interdites sera parallèlement mise en œuvre, ce qui devrait permettre d’interdire la vente ou l’adoption d’un animal à une personne fichée pour maltraitance.

* Il est indiqué dans le Code pénal que toute personne exerçant publiquement ou non des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou qui commet un acte de cruauté envers un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité est puni de 2 ans de prison et de 30 000 € d’amende.

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