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Les avocats au chevet de l’animal

Maître Desvallon, avocate au Barreau de Paris, a créé un groupe réunissant vingt avocats du Barreau de Paris pour travailler à la création d’un statut juridique propre à l’animal, inexistant aujourd’hui.

Les avocats au chevet de l’animal
Shutterstock

Marie-Bénédicte Desvallon – Photo Frans Lanting

30MA : Pourquoi avoir décidé de réunir des avocats autour de la question animale ?

Marie-Bénédicte Desvallon : Le projet d’un groupe de travail initié en janvier 2017 au sein du Barreau de Paris résulte de trois constats. D’abord celui d’une démultiplication des définitions et statuts juridiques des animaux non fondés, sinon économiquement, et d’une dissémination des concepts dans les différents codes existants. Le constat d’un besoin ensuite : le cadre législatif et réglementaire actuel ne répond ni à la nécessité d’accessibilité, de lisibilité et encore moins d’intelligibilité. Il ne prend pas ou pas assez en compte les avancées scientifiques, éthologiques et éthiques. Le constat d’une demande enfin : la préoccupation du bien-être animal est devenue une question sociétale, politique et économique qui témoigne de l’insuffisance du droit existant.

30MA : Quel est l’objectif de ce groupe de travail ?

M.B.D : L’objectif du groupe de travail est d’élaborer un code autonome des droits de l’animal. Au-delà d’une compilation des textes, il s’agit de faire évoluer le droit français et de créer un statut juridique propre de l’animal en dépassant la division juridique des personnes et des biens. Là où la morale ne suffit plus, la loi place le curseur et participe à l’évolution, ou pas, d’une société et des consciences humaines. Il ne s’agit pas d « humaniser » les animaux. Dans le Dictionnaire historique de la langue française, « Humaniser » signifie « mettre à la portée de l’homme ». Nous avons bien au-delà de toute raison, de toute morale mis les animaux à notre portée.

30MA : Quelles peuvent être les applications concrètes issues de ces différentes réflexions

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M.B.D : A travers nos conférences, nous développons des coopérations techniques avec les scientifiques, les institutions et les autorités judiciaires pour soumettre des propositions de textes visant à mieux protéger les animaux quelle que soit l’espèce, et offrir un outil juridique efficace aux défenseurs des animaux.

30MA : La dernière session a eu pour thème le trafic d’animaux : quelle est l’ampleur de ce phénomène ?

M.B.D : Le trafic d’animaux est aujourd’hui le quatrième trafic mondial. Ce phénomène touche aussi bien les animaux sauvages que domestiques, les animaux vivants que les produits dits « dérivés » tels que les ailerons de requin, les défenses d’éléphant, les cornes de rhinocéros ou les fourrures. Avec l’ère du numérique, le trafic connaît aussi de nouveaux circuits très préoccupants : on répertorie plus de trois cents sites Internet de vente d’animaux en ligne.

30MA : De tels trafics existent-ils à l’échelle nationale ?

M.B.D : La France connaît aussi ces fléaux, comme on a pu le déplorer lors du vol de cornes de rhinocéros dans le zoo de Thoiry. Elle est également, par sa situation géographique, au carrefour de trafics de grande envergure tels que les vols de chiens revendus à des laboratoires, leur placement dans des filières reproductives clandestines, ou encore leur utilisation pour la mendicité. Il se traduit aussi par l’organisation de ventes aux enchères secrètes d’ivoire, ou le trafic de chevaux volés pour la viande. S’agissant du commerce électronique, un rapport de l’IFAW de 2014 a démontré que les sites français, avec en premier Le Bon Coin.fr, proposaient plus de 1500 articles dont 57% d’animaux vivants et le reste de produits dérivés.

30MA : Quel rôle la France doit-elle jouer pour la protection des animaux ?

M.B.D : L’élaboration d’un code autonome aurait l’avantage d’amorcer un véritable changement dans la considération des autres êtres vivants. Cette démarche progressiste doit contrer des pratiques d’un autre temps, dont certaines continuent de recevoir des aides et subventions telles que la corrida pour ne citer qu’elle.

30MA : Sur quoi va porter la prochaine réunion de votre groupe de travail ?

M.B.D : La prochaine conférence du groupe portera sur les questions sanitaires : de l’alimentation animale aux expérimentations entre autres.

La liste des avocats fondateurs du groupe de travail

Caroline ANDRIEU ; Béatrice BABIGNAN ; Geoffrey BÉLONY ; Sandra BURY ; Aurélie CAGNARD ; Blanche DE GRANVILLIERS ; Marie-Bénédicte DESVALLON ; Karine DOUCERAIN ; Cerise DUCOS ; Caroline GOLDBERG ; Magali GREINER ; Agnese GUERSI ; Laurence JOSEPH-THEOBALD ; Julie LADO ; Frédérique LENDRES ; Anne-Louise NICOLAS-LAURENT ; Jade SARRAJ ; Marine SCHAEFFER ; Solange VIGER ; Aurélie VUCHER-BONDET.

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Publié le 24 novembre 2017
4 minutes
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