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Delphinarium : la fin de la reproduction en captivité au cœur du débat

Le Marineland d’Antibes demande la réécriture de l’arrêté, interdisant notamment la reproduction en captivité des dauphins, au nom du bien-être animal. L’argument passe mal auprès des associations de défense des animaux qui demandent la mise en place de programmes de réhabilitation à la vie sauvage pour les cétacés en captivité.

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Delphinarium : la fin de la reproduction en captivité au cœur du débat
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Ca ne passe pas : la publication d’un arrêté le 6 mai dernier au Journal Officiel, visant à renforcer la réglementation des delphinariums, n’est pas acceptée par les quatre parcs français* ayant des bassins avec des orques et des dauphins. Parmi eux, le Marineland d’Antibes a annoncé avoir déposé un recours devant le Conseil d’Etat pour que soit réécrit cet arrêté, signé par Ségolène Royal lorsque elle était encore ministre de l’Environnement.

« Nous ne sommes pas là pour crier au scandale, insiste Pascal Picot, Directeur général de Marineland. Nous sommes pour une révision de la réglementation des delphinariums datant de 1981, car elle est obsolète, mais nous demandons la réécriture de l’arrêté du 6 mai dernier car pour nous il est difficilement tenable. » Pour le parc, le principal problème vient de l’interdiction de reproduction des dauphins en captivité (s’ajoutant à une interdiction similaire pour les orques), introduite « à la dernière minute » dans le texte de l’arrêté qui se limitait, dans son avant-dernière version, à un « contrôle étroit de la reproduction des dauphins ».  

Protection animale et enjeux économiques

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Le véritable enjeu de ce nouvel arrêté, pour Marineland comme pour les autres delphinariums français, est d’ordre économique. La disparition programmée des dauphins en captivité devrait effectivement conduire à la fin « de l’activité des delphinariums », comme le dénonce Marineland dans un communiqué, et donc à la fin des recettes  engendrées par ces animaux. Qualifiés de « légendaires » par le parc, au même titre que « les orques, les otaries et les tortues », les dauphins font partie intégrante du succès d’une structure comme Marineland, « accueillant un million de visiteurs chaque année ». En outre, en imposant de nouvelles normes, notamment sur la taille des bassins, pour améliorer les conditions de vie des cétacés, l’arrêté du 6 mai oblige les parcs à delphinariums à faire de nouveaux investissements. Mais pour le directeur du Marineland, « on ne peut pas nous demander d’investir des millions d’euros pour faire des travaux dans nos bassins et nous dire, dans le même temps, que nous n’existerons plus à plus ou moins court terme ».

Cependant, ce ne sont pas ces contraintes économiques qui sont principalement mises en avant par le parc d’Antibes pour demander une révision de l’arrêté du 6 mai 2017, mais une problématique d’une tout autre nature : pour Marineland, interdire la reproduction des dauphins est une atteinte au bien-être animal, justement défendu par la nouvelle réglementation.

Des programmes de réhabilitation pour ne pas sacrifier les derniers dauphins captifs

Du point de vue du parc, il s’agit là d’ « une altération des comportements naturels » des dauphins.  « Si nous séparons les mâles des femelles, nous courons au drame, si nous utilisons des contraceptifs, nous serons obligés de donner des substances chimiques aux dauphins, ce qui est interdit par l’arrêté, et de plus, personne ne connait les effets à long terme d’une telle contraception pour la santé des dauphins » précise Pascal Picot. Jugé comme étant de très mauvaise foi par les associations de défense des animaux, cet argument n’est cependant pas éludé. On peut souhaiter que « cette génération de dauphins captifs soit la dernière (sans) qu’elle ne soit pour autant une génération sacrifiée » souligne notamment Sea Shepherd dans une lettre ouverte adressée aux soigneurs de Marineland.

Plusieurs associations demandent ainsi la mise en place de programmes de « réhabilitation de ces orques et dauphins à la vie sauvage ». Sea Shepherd propose même aux delphinariums de s’associer à ces programmes, ce qui permettrait aux parcs de prendre une nouvelle voie pour se réinventer. « Au lieu de nous combattre, aidez nous à (…) donner les clés d’une nouvelle vie » aux animaux encore présents dans les delphinariums, propose l’ONG, car « toutes les bonnes énergies seront nécessaires ».

Mais delphinariums et associations de défense des animaux restent divisés sur une question de fond, celle du bien-être des cétacés en captivité. Pour Pascal Picot, il s’agit  de « conviction et d’émotion. Je peux comprendre que des personnes soient contre, mais cela ne repose sur aucun argument scientifique. »

Une evolution societale incontournable 

Faux répondent les associations qui réfutent cette prise de position. De « nombreuses études scientifiques attestent d’une évidence qui n’est plus contestée que par les delphinariums eux mêmes : les dauphins nés ou vivant en captivité mènent une existence bien plus courte et plus morose que leurs congénères libres, bien en deçà de leurs besoins physiologiques, de leur organisation sociale complexe et de leurs aptitudes émotionnelles extraordinaires qui par bien des aspects, dépassent celles des humains » détaille Sea Sheppherd.

De même, les missions de « conservation des espèces », et de « pédagogie et sensibilisation » au monde marin avancées par le Marineland semblent difficilles à justifier. Dans une pétition pour que soit maintenu l’arrêté du 6 mai, mise en ligne quelques jours après la publication du nouveau texte, l’association C’est Assez ! s’interroge à ce sujet : «  L’espèce Tursiops Truncatus (grand dauphin N.D.L.R) exhibée en bassin n’étant pas en danger d’extinction à l’état sauvage, quel est l’intérêt de continuer à faire se reproduire ces animaux hautement intelligents et sensibles ? »

Au delà des aspects économiques, législatifs, et scientifiques de la question des delphinariums,  les évolutions sociétales laissent à penser que la captivité des orques et des dauphins est de moins en moins acceptée par le grand public. La pétition de C’est Assez ! a récolté, depuis le 10 mai, plus de 37 000 signatures, et celle de la Fondation 30 Millions d’Amis, mise en ligne en janvier 2017 pour demander la fin des delphinariums, a reçu près de 70 000 signatures. Par comparaison, la pétition du Marineland, lancée à la mi-mai, a réuni près de 4000 soutiens. La fin des delphinariums et la transformation des parcs concernés semblent inévitables.

* Marineland (Alpes-Maritimes), Planète Sauvage (Loire-Atlantique), le Parc Astérix (Oise) et le Moorea Dolphin Center en Polynésie française.

Les pays européens sans delphinariums

A l’étranger, il existe plusieurs pays sans aucun delphinarium : certains n’en n’ont jamais eu, d’autres ont fait le choix des les fermer, et d’autres encore, à l’instar de la Grande-Bretagne, ont imposé des normes drastiques ayant conduit à la fin des bassins. On compte actuellement une dizaine de pays européens sans delphinariums, comme l’Autriche, Chypre, la République Tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, le Luxembourg, la Pologne, la République d’Irlande, la Slovaquie et la Grande Bretagne.

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