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L’arche de Namibie

Du nord au sud, la Namibie est une terre de contrastes. Entre le désert du Kalahari, le désert du Namib et la Skeleton Coast, la faune sauvage a su s’adapter à l’intense sécheresse et y trouver des lieux de tranquillité, jusque-là à l’abri du braconnage.

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L’arche de Namibie
Mathieu Pujol

Le soleil s’approche de l’horizon dans le parc d’Etosha. Baigné par les dernières lueurs de la journée, un clan d’éléphants se dirige droit devant à vive allure. La jeune femelle qui ouvre la marche se presse, trompe dressée, et oriente le groupe en direction d’un trou d’eau où toute la famille va pouvoir se désaltérer après une journée à chercher de la nourriture dans les plaines arides du parc.
Le bar est ouvert, chaque éléphant se presse, trempe sa trompe et en ressort des litres d’eau. Le spectacle est à la hauteur, la lumière d’or enrobe les silhouettes des pachydermes qui se succèdent. Mais attention, la matriarche veille. Elle garde un œil sur les allées et venues des individus étrangers au groupe. De temps en temps, elle se retourne brusquement pour montrer qu’elle ne se laissera pas faire. Cette immense mammifère de près de 5 tonnes soulève la poussière à chacun de ses pas. L’ambiance légendaire d’Etosha n’en est que renforcée.
Non loin de là, un vieux mâle assiste au spectacle quelques secondes, reprend sa route en direction de la plaine et repart mener sa vie de solitaire. Il préfère la tranquillité et ne se joindra à des groupes que lorsqu’il sera temps de se reproduire.
Le lendemain, le même mâle se tient au bord d’un trou d’eau à quelques kilomètres de là. Il boit et s’arrose d’eau en prévision de la journée qui s’annonce chaude. L’eau est mélangée à de l’argile, ce qui donne une coloration blanche à la boue : voilà notre pachyderme transformé en statue. C’est d’ailleurs une vision assez originale et surprenante que de voir ces énormes animaux couverts de cette « pâte » blanche. Tandis que l’éléphant est occupé, un rhinocéros noir s’approche en toute discrétion. Lui aussi a soif, mais il ne veut pas boire dans la zone stagnante du trou d’eau. Il veut de l’eau fraîche. Le vieil éléphant ne l’entend pas de cette oreille et le repousse à plusieurs reprises en l’arrosant. Pour mettre fin aux tentatives, il envoie un signal clair en s’avançant dans la mare pour y planter ses quatre lourdes pattes… Message reçu. Le rhinocéros tourne les talons… Il n’aura bu que quelques gouttes.
Au bord du trou d’eau, la vie est intense en plein cœur du désert du Namib. Toute la journée, de longs défilés d’animaux s’y pressent et se côtoient. Parfois, des prédateurs se mêlent aux proies mais n’y sont tolérés que quelques minutes. On peut y voir plus de dix espèces différentes telles que les autruches, les oryx, les impalas, springboks, koudous, les girafes, les éléphants, les chacals, les pintades, les gangas, etc.

Surprédation surveillée

Parmi les animaux emblématiques de ce pays tout en contraste situé entre le désert du Kalahari, le désert du Namib et la Skeleton Coast (la côte des Squelettes), il en est un plus charismatique que les autres. L’oryx, devenu l’emblème de la Namibie. Parfaitement adapté à la vie en milieu désertique, cet herbivore aux cornes longues et pointues est capable de terrasser un lion dont la population est ici sous étroite surveillance. Elle est, en effet, volontairement limitée à 300 individus sur les 22 275 km2 de cette réserve clôturée afin de limiter la surprédation. Dès que leurs effectifs dépassent ce chiffre fatidique, certains groupes sont déplacés dans d’autres parcs. C’est au cœur des dunes du désert du Namib que l’oryx est le plus resplendissant. Évoluant au milieu des étendues de sable jaune ou orange, ces animaux sont les maîtres des lieux. Capables de rester une année sans boire, ils savent tirer parti des moindres avantages de cette zone hostile. Au cœur du parc national de Sesriem, les oryx ponctuent de la plus belle des manières les courbes et les lignes de crête des dunes.
Lorsqu’un trou d’eau est localisé, les individus s’y rendent une à deux fois par jour pour s’abreuver, avant de partir se nourrir de végétation dans les dunes ou les plaines. Mais pour boire, il faut respecter la hiérarchie en vigueur. Les plus costauds d’abord et, au cas où un individu ne serait pas d’accord, il peut toujours régler ses comptes à grands coups de cornes.
À l’ouest du désert du Namib, lorsque les dunes rencontrent l’océan Atlantique, les oryx se nourrissent de melons du désert. Ils s’abreuvent directement dans de petits trous d’eau creusés par les chacals car, à cet endroit, l’eau affleure à moins de 2 mètres sous la surface du sol. Les chacals ne sont pas intéressés par les melons d’eau, ils préfèrent parcourir le bord de mer à la recherche de jeunes otaries mortes d’épuisement, essayer d’attraper quelques oiseaux ou encore déterrer quelques reptiles. Comme le gecko du désert, qui est la mascotte du désert du Namib. Ce petit animal aux yeux spectaculaires vit dans de petits trous qu’il creuse à même les dunes. Il n’affectionne pas particulièrement le soleil qui peut le tuer. Sa peau est fragile et on arrive presque à deviner la position de ses organes par transparence. Il n’en demeure pas moins que ce petit animal, amateur d’insectes, possède des yeux incroyables, contrastés, colorés comme une pierre précieuse.

Astuces solaires

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Si le gecko ne supporte pas le soleil, il y en a un qui a trouvé la parade contre ses rayons ardents: le caméléon namaqua. Afin d’éviter la surchauffe et de réguler sa température, il adapte astucieusement les contrastes de sa peau. Couleur sombre côté ensoleillé pour absorber la chaleur, et couleur claire côté ombre pour l’évacuer. Ainsi, il peut déambuler dans les dunes à la recherche de petits insectes qu’il attrape du bout de sa langue collante. Attention quand même, car la vipère de Péringuey n’est jamais loin et peut lui tendre un piège. Enfouie dans le sable, elle agite le bout de sa queue afin d’attirer ses proies. Leurrés, les animaux qui pensent avoir trouvé un insecte ou un petit animal enfoui, ignorent qu’en s’approchant ils vont tomber dans la gueule de la vipère qui surgira du sable en un millième de seconde. La fuite est impossible… Une fois le repas englouti, elle n’a plus qu’à rejoindre un petit buisson où elle pourra digérer en toute tranquillité, laissant les traces de son passage dans le sable rose.
Beaucoup plus discrète, l’araignée dame blanche a également élu domicile dans ces lieux hostiles. Elle tisse son nid sous la surface du sable. Accessible par un petit opercule d’où elle chasse, cette mygale est douée de grandes capacités. En cas de danger, elle se met en boule et peut dévaler les dunes à la vitesse de 20 tours par seconde pour échapper à un prédateur. Capable de sauter pour attraper ses proies, cette araignée est un excellent chasseur. À moins que la femelle ne décide de dévorer son mâle à l’issue de l’étreinte nuptiale…

Rhinos sous bonne garde

La Namibie n’offre pas qu’un paysage de sable. À l’ouest d’Etosha s’étend la concession du Palmwag. Ici, la faune s’est adaptée aux conditions de vie désertique du décor de roches rouges. Les éléphants du désert et les derniers rhinocéros noirs libres d’Afrique y vivent sous bonne garde. Accompagné de deux rangers, on peut les approcher à pied en prenant mille précautions. Le premier ranger ouvre la route qui mène à ces incroyables animaux tandis que le second assure la sécurité et fait diversion en cas de charge d’intimidation. Les rhinocéros connus des rangers sont identifiables grâce aux entailles situées au niveau des oreilles et réalisées par les rangers eux-mêmes lors de la capture des jeunes individus. Grâce à elles, ils peuvent reporter dans le registre de la réserve toutes les observations les concernant : état de santé, comportement, marques et localisation de la dernière observation. Il faut dire que dans cet univers, il est très difficile de les trouver. Une chance pour ces animaux qui sont l’objet d’un braconnage intense et systématique dans d’autres parties du continent africain. Dans cette grande zone, les rhinocéros sont tranquilles, ils subsistent en se nourrissant d’herbes et de feuilles qu’ils trouvent dans les buissons. Ils se mêlent encore en toute liberté aux girafes, grands koudous et zèbres de montagne qui arpentent les reliefs à la recherche de nourriture. Pour combien de temps ?

Le pays des parcs

La Namibie compte 20 parcs nationaux qui couvrent environ 17 % du territoire. Depuis 1996, la loi permet aux populations de gérer les territoires sur lesquels elles vivent. Elles sont responsables de la faune, assurent sa sécurité et perçoivent les bénéfices du tourisme. Afin de donner un coup de pouce à la nature, le gouvernement a accéléré le processus en déplaçant des animaux en provenance des parcs nationaux, ou d’autres réserves, vers les « conservatoires ». C’est ainsi qu’un grand nombre de réserves dites « régionales » ont été créées : des lieux privés ou publics, gérés de façon durable dans le but de protéger et de sauvegarder la faune afin d’attirer les visiteurs du monde entier. Véritable paradis pour les touristes, la Namibie est aussi un havre de paix pour la faune sauvage. Mais si l’on se réfère aux statistiques communiquées par le MET (ministère de l’Environnement et du Tourisme), la Namibie a perdu, en 2015, plus de 79 rhinocéros abattus par des braconniers. C’est pourquoi aujourd’hui, le gouvernement ne communique que très peu autour des moyens employés pour protéger la faune afin de lutter au mieux contre les braconniers. Des primes sont versées aux personnes informant le gouvernement d’une activité illégale.

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