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« Marche avec les loups » : deux ans d’immersion dans la montagne

Après La Vallée des loups (2017), Jean-Michel Bertrand poursuit son enquête sur ces prédateurs énigmatiques. Cette fois, il part sur les traces des jeunes loups quittant la meute en quête d’un nouveau territoire. Un film drôle, beau et captivant à aller voir au cinéma dès le 15 janvier !

« Marche avec les loups » : deux ans d’immersion dans la montagne
Bertand Bodin

Pendant trois ans, le cinéaste Jean-Michel Bertrand a approché l’intimité d’une meute de loups dans une vallée perdue des Alpes, ce qui a donné lieu au film « La Vallée des Loups » (2017), qui a totalisé plus de 200 000 entrées. Au cours de son immersion, il a observé à plusieurs reprises les louveteaux, alors devenus grands, quitter le clan. Dans son nouveau film « Marche avec les loups », en salles le 15 janvier, l’aventurier armé de sa caméra a décidé de suivre pendant deux ans un de ces jeunes afin de comprendre son périple en quête d’un nouveau territoire. Ils doivent dès lors traverser des zones hostiles, déjà occupées par leurs semblables et dans lesquelles ils ne sont pas les bienvenus, ou d’autres, plus nombreuses, colonisées par les humains : villages, routes et grandes agglomérations qu’ils devront à tout prix réussir à franchir, au péril de leur vie. Sans oublier cette menace permanente des tirs, dits de prélèvement, décidés par les hommes qui n’acceptent pas le partage de leur territoire avec le prédateur diabolisé. Se pose alors la question de savoir qui empiète sur le territoire de l’autre…

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Ce film n’est pas un documentaire animalier. C’est une véritable aventure réalisée en immersion totale dans la nature, aux images époustouflantes et aux péripéties fascinantes. « Marche avec les loups » est une authentique ode à la biodiversité, sensibilisant les spectateurs au respect des animaux et de la nature.

Une meute de loups est composée, en France, de deux à six individus, voire huit. Le nombre d’individus s’adapte à la taille de leur territoire. Il est régi par l’abondance des proies et leur répartition. D’une manière générale, les loups ne supportent pas d’être trop nombreux, à l’image des aigles et des renards. C’est pourquoi les louveteaux devenus grands quittent le groupe entre 2 et 4 ans. Vulnérables et peu expérimentés, ces jeunes parcourent des espaces qu’ils ne connaissent pas et doivent chasser seuls.

QUATRE QUESTIONS À JEAN-MICHEL BERTRAND

Animaux-Online : Pourquoi avoir choisi le loup comme personnage principal de vos deux derniers films ?

C’est un animal rare et difficile à voir. Son histoire est fascinante puisqu’il avait totalement disparu du territoire français en 1937. Il restait quelques loups en Italie qui ont été protégés à partir des années 1970. Il y a eu l’exode rural, au cours duquel les campagnes se sont vidées, et également un reboisement des forêts, et donc un retour des ongulés. Tout cela a fait que le loup est revenu s’installer en France et c’est la preuve qu’il existe une résilience de la nature. Qu’à partir du moment où on lui fout la paix, ça repart ! C’est vraiment un animal mythique que j’ai toujours espéré voir. Si on m’avait dit, quand j’étais petit, que j’observerais un jour des loups dans la vallée où j’ai grandi, jamais je ne l’aurais cru. Pourtant, c’est arrivé et c’est une super nouvelle d’un point de vue biologique !

Bertrand Bodin. Jean-Michel Bertrand en train de poser ses pièges photographiques dans la forêt

AO : L’histoire de « marche avec les loups » est vraiment incroyable. Tout ce que le spectateur voit est-il vrai ?

Il s’agit vraiment de l’enquête que j’ai menée. Après, bien sûr, il y a un côté « fictionné » car je ne suis pas capable de suivre un loup dans la montagne en courant. Ce qu’il s’est passé, c’est que je restais trois semaines seul dans la nature, en immersion, où je filmais. Puis j’étais rejoint pendant une semaine par Marie Miguet, cadreuse, avec qui on remettait en scène des moments car il ne faut pas oublier que c’est du cinéma. Il y a également Boris Jollivet, ingénieur du son et audionaturaliste qui est venu nous accompagner et qui a fait un travail remarquable. Ce rythme a duré deux ans, et ensuite il y a eu cinq mois de montage. Le film s’est écrit au jour le jour, même si j’avais une trame au début. Par exemple, je savais que je devais me rendre dans le Jura car il y avait eu des indices que des loups isolés y étaient passés.

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DR.

AO : Immergé dans la nature, seul, qu’est-ce qui est le plus dur à vivre ?

Il n’y a rien de difficile ! J’aurais volontiers signé pour un an de plus. Au final, le plus frustrant, c’est de devoir arrêter et rentrer chez soi. Lorsque j’étais seul dans la nature, je faisais des allers-retours pour recharger les batteries des appareils et prendre une douche, par exemple. Je restais en moyenne 4 jours par semaine en bivouac. Mais, même si on apprécie grandement une bonne douche chaude, j’avais l’impression de rater des choses et je voulais y retourner le plus rapidement possible. Si dormir dans la nature est quelque chose que vous faites une fois par an, forcément, les nuits doivent vous paraître bizarres. Dans mon cas, c’est là que je dors le mieux ! Je n’ai aucun mauvais souvenir à part peut-être celui de devoir se lever la nuit, en pleine tempête et par –15 degrés, pour aller pisser ! (rires)

AO : Avez-vous un message à faire passer aux anti-loups ?

Que les loups sont là, et qu’ils seront sûrement toujours là dans 20 ans. Il faut faire avec, arrêter d’instrumentaliser l’animal, d’être complotiste et de dire que les éleveurs et les bergers sont abandonnés. C’est faux. Il existe une importante solidarité nationale qui les soutient financièrement. Par exemple, on entend beaucoup les éleveurs dire, dans le parc national des Écrins : « Les loups ont plus d’importance que nous ». Or, 80 % du temps de travail des agents du parc est dédié au pastoralisme. Je ne suis pas spécialiste de la question, juste un témoin, et j’ai croisé plusieurs éleveurs installés dans des zones où le loup était présent et qui ne déploraient aucune attaque car ils avaient des chiens qui protégeaient efficacement les troupeaux. Après, il y a encore du travail à faire de ce côté, mais une chose est sûre : le loup et le pastoralisme sont compatibles et on a l’exemple avec plusieurs autres pays.

Le film se décline également en livre, écrit par Jean-Michel Bertand lui-même et illustré par les sublimes photos de Bertand Bodin, qui a couvert en images la quête du cinéaste pendant ces deux années.

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