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La Terre a perdu 60% de ses animaux sauvages en 44 ans

Le WWF, créé en 1961, suit le déclin accéléré des populations animales sur Terre. Voici quelques conclusions de son dernier rapport « Planète vivante », auquel ont contribué une cinquantaine d’experts et qui reprend aussi de grandes études scientifiques publiées sur le sujet.
– avec AFP –

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La Terre a perdu 60% de ses animaux sauvages en 44 ans
Shutterstock

Mammifères, oiseaux, poissons… sous la pression de l’homme, la Terre a vu ses populations de vertébrés sauvages décliner de 60% entre 1970 et 2014, a annoncé le Fonds mondial pour la nature (WWF) dans un bilan plus alarmant à chaque édition. « Préserver la nature ce n’est pas juste protéger les tigres, pandas, baleines, que nous chérissons », souligne le directeur du WWF, Marco Lambertini. « C’est bien plus vaste : il ne peut y avoir de futur sain et prospère pour les hommes sur une planète au climat déstabilisé, aux océans épuisés, aux sols dégradés et aux forêts vidées, une planète dépouillée de sa biodiversité ».

Un déclin qui s’accélère

 Le déclin de la faune concerne tout le globe, avec des régions particulièrement affectées, comme les Tropiques, selon le 12e rapport « Planète vivante », publié mardi avec la Société zoologique de Londres et basé sur le suivi de 16.700 populations (4.000 espèces). Le 10e rapport faisait déjà état de la disparition des espèces, à hauteur de 52% entre 1970 et 2010. Rien ne semble freiner l’effondrement des effectifs puisqu’aujourd’hui le chiffre est de à -60%. Le déclin des animaux d’eau douce atteint même 83%, sous le coup de la surexploitation, parfois involontaire comme pour les dauphins de rivière (prises accidentelles en filets), et de la perte des habitats. Autre exemple, la population d’éléphants dans la zone de Selous-Mikumi, en Tanzanie, a diminué de 66% entre 2009 et 2014. Depuis 1976, l’espèce a subi un déclin de 86%, du fait du braconnage en premier lieu.

Des zones plus touchées que d’autres

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La zone Caraïbe/Amérique du sud affiche un bilan « effrayant »: – 89% en 44 ans ! L’Amérique du nord et le Groënland s’en sortent un peu mieux, avec une faune diminuée de « seulement » 23%. La vaste zone Europe, Afrique du nord et Moyen-Orient est à –31%. Explication première : la perte des habitats, avec l’agriculture intensive, l’extraction minière, l’urbanisation… qui poussent à la déforestation, à l’épuisement ou à l’artificialisation des sols.

En 50 ans, près de 20% de la forêt amazonienne, la plus grande du monde, a disparu. Dans le monde, les forêts tropicales continuent de reculer, principalement sous la pression des industries du soja, de l’huile de palme et de l’élevage. Entre 2000 et 2014, le monde a perdu 920.000 km2 de forêts intactes, une surface quasi égale à la France et l’Allemagne réunies. Selon des données satellitaires, ce rythme a crû de 20% de 2014 à 2016 par rapport aux 15 dernières années.

Des conséquences sur nos sociétés

« La disparition du capital naturel est un problème éthique, elle a aussi des conséquences sur notre développement, nos emplois, et on commence à le voir », souligne le DG du WWF France Pascal Canfin. « On pêche moins qu’il y a 20 ans car le stock diminue. Le rendement de certaines cultures commence à baisser ; en France celui du blé stagne depuis les années 2000, » dit-il, avant de conclure : « Nous scions la branche sur laquelle nous sommes assis ».

 Les « services rendus par la nature » (eau, pollinisation, stabilité des sols, etc.) ont été estimés par des économistes à 125.000 milliards de dollars annuels, soit une fois et demi le PIB mondial. Chaque année, le « jour du dépassement » arrive plus tôt, ce jour à partir duquel le monde a consommé toutes les ressources que la planète peut renouveler en un an. En 2018, c’était le 1er août. Et pourtant « l’avenir des espèces semble ne pas retenir suffisamment l’attention des dirigeants », s’alarme le WWF pour qui il faut « relever le niveau d’alerte », provoquer un vaste mouvement comme ce fut le cas pour le climat. « Que tout le monde comprenne que le statu quo n’est pas une option ». Un combat d’autant plus gratifiant que les efforts peuvent payer vite, comme l’a montré le retour du tigre au Népal, du thon rouge de l’Atlantique ou du saumon de la Loire pour lesquels des mesures de préservation ont été mises en œuvres…

3 questions à Christine Sourd, directrice adjointe des programmes « Biodiversité » à WWF France :

Animaux-Online : Suite à ce rapport, comment résumeriez-vous la situation ? Est-elle désespérée ?

Christine Sourd : Si nous faisons chaque année ce rapport, c’est qu’il y a de l’espoir et qu’il est encore possible de stabiliser les choses. C’est le 1er objectif que l’on vise. Ensuite, on aimerait une reconquête des espèces et cela passe par des changements politiques aux plus hauts niveaux. Les pays doivent s’unir et mettre en place des programmes pour la planète, plus ambitieux encore que ce que l’on fait actuellement. Il faut également que l’agriculture et l’industrie intègrent la biodiversité dans leurs pratiques, afin de faire en sorte que la pêche, ou l’extraction de minerai par exemple, n’impactent pas davantage la nature, et c’est possible. Enfin, il faut continuer de soutenir la recherche sur la biodiversité.

A-O : Qu’est-ce qui empêche le ralentissement de cette chute de la biodiversité ?

C.S : En France, les citoyens sont très sensibles à la biodiversité, plus que dans le monde d’une manière générale. Mais il y a un manque de pression de leur part sur les hautes sphères politiques afin de faire bouger les choses. Par ailleurs, en Europe, on commence à avoir de bonnes pratiques, mais au détriment de la biodiversité extérieure. Par exemple, le soja est énormément consommé comme alternative à la viande. Sauf que les plantations de soja entraînent la destruction des forêts tropicales, qui entraîne elle-même la disparition des espèces. C’est ce qu’on appelle  » la dette écologique « . Ce sont des effets indirects et le consommateur a du mal -et c’est normal- à se rendre compte de ça.

A-O : Alors que ce rapport est alarmiste, la Chine vient de rouvrir le commerce des produits à base de tigres et de rhinocéros. Qu’en pensez-vous ?

C.S : WWF est en train d’essayer de faire pression sur le gouvernement chinois afin qu’il revienne sur sa décision, car l’usage qu’ils veulent faire de ses produits est sans enjeux. Même si cela concerne seulement les animaux présents sur leur territoire, c’est complètement incohérent avec leur décision de 2016 qui a été d’interdire l’importation de ce genre de produits. Remarquez, la France aussi est incohérente puisqu’elle veut pousser le monde à protéger davantage la biodiversité et à côté elle autorise la recherche minière au large de la Guyane. Le WWF essaye là encore de stopper ce projet.

La Chine à reculons

Le commerce de produits tels que l’os de tigre ou la corne de rhinocéros pourra être autorisé en Chine sous certaines conditions « particulières », a annoncé le gouvernement chinois dans une circulaire signée par le Premier ministre Li Keqiang. Parmi celles-ci, Pékin cite la recherche scientifique, la vente d’œuvres d’art et « la recherche et les traitements médicaux ». Cependant, les vertus de la poudre issue d’os de tigres et de corne de rhinocéros, prisée dans la médecine traditionnelle chinoise, sont extrêmement controversées. Les ONG craignent que cette circulaire permette le blanchiment des produits du braconnage et relance ce dernier.

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