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Les abeilles : une pour toutes, toutes pour une

Souvent, on ne connaît d’elle que le miel qu’elle élabore dans le secret de sa ruche. Minuscule, avec un cerveau grand comme une tête d’épingle, l’abeille recèle pourtant bien des mystères. A commencer par celui de sa danse, qui la mène immanquablement sur la bonne corolle…

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Les abeilles : une pour toutes, toutes pour une
Eric Tourneret

Un cerveau à trois mémoires

Eric Tourneret. L’abeille est dotée de trois mémoires.

Le cerveau d’une butineuse est minuscule – une tête d’épingle – et ne comporte que 960 000 neurones quand le nôtre en compte plus de 100 milliards. Elle est pourtant capable d’apprendre en 30 minutes, puis d’appliquer des concepts totalement abstraits. Des chercheurs ont ainsi démontré que les abeilles sont capables d’acquérir différentes règles comme « est identique à » ou « est au-dessus de »… une faculté réservée jusque-là aux seuls mammifères « supérieurs ». On sait aussi que l’abeille est dotée de trois mémoires, qui lui servent notamment à se souvenir du chemin qui mène aux fleurs. Lorsque, dans les années 1990, des apiculteurs se sont alarmés des baisses subites de population de leurs ruches et parfois de la disparition de toutes leurs habitantes, ils ont  associé le phénomène à une nouvelle classe de pesticides répandue dans les champs : les néonicotinoïdes, justement surnommés « tueurs d’abeilles ». Il s’est avéré que les butineuses en contact avec ces produits, même à des doses infinitésimales, ne sont plus capables de retrouver le chemin de la colonie, et meurent, tandis que la ruche se vide peu à peu. De là à penser que ces mêmes produits affectent également notre cerveau…

Un superorganisme

Eric Tourneret. Le superorganisme a son propre mode de reproduction.

Une colonie d’abeilles est comparable à un organisme dont chaque cellule serait une abeille. Ses organes reproducteurs sont les faux-bourdons et la reine, qui est en réalité plus pondeuse que souveraine. Très vite après sa naissance, celle-ci sort du nid pour son vol nuptial, où elle est fécondée à près de 20 mètres du sol par une quinzaine de mâles. Le reste de sa vie se déroule dans la ruche, où elle pond sans répit, choyée par sa cour. La mère de la colonie a une exceptionnelle longévité de quatre à cinq ans, comparée à ses filles qui ne vivent que le temps d’un été, 50 jours. La colonie est principalement composée d’ouvrières stériles, environ 60 000 individus que nul ne gouverne. Ils sont pourtant capables de gérer en temps réel les ressources de leur territoire (qui s’étend sur plus de 25 km2) et d’apporter une réponse adaptée aux fluctuations de leur environnement – température, floraisons, agressions extérieures… Les ouvrières exercent successivement tous les métiers de la ruche, en fonction de leur âge. Elles sont d’abord nettoyeuses, puis nourrices, bâtisseuses, magasinières, ventileuses, gardiennes et exercent enfin, au faîte de leur expérience, le dangereux métier de butineuses. Le superorganisme a aussi son propre mode de reproduction par division, l’essaimage, au cours duquel la reine quitte la cité prospère avec la moitié de ses filles pour créer une autre colonie dans une nouvelle demeure.

Les degrés de la différence

Eric Tourneret. La reine porte en elle la semence de 15 à 18 mâles.

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Les petites ouvrières, si semblables en apparence, sont pourtant des individus uniques dont les différences s’affichent au cours de leur courte existence. Ainsi, telle ouvrière préfère les tâches à l’extérieur de la ruche, tandis que telle autre se plaît à l’intérieur ; l’une est une butineuse acharnée, enchaînant les sorties et garnissant les alvéoles, quand une autre se contente de deux ou trois collectes dans la journée.  Ces différences qui font l’équilibre de la colonie s’expliquent par les lignées des pères – la reine porte en elle la semence de 15 à 18 mâles – mais aussi par la température à laquelle ont été élevées les abeilles alors qu’elles n’étaient encore que des nymphes.

La démocratie des abeilles

Eric Tourneret. Les butineuses, plus expérimentées font état de leurs explorations au reste de l’essaim.

Lors de l’essaimage, la colonie, qui a quitté la ruche mère, doit procéder au choix d’une nouvelle demeure pour survivre à l’hiver. Les butineuses les plus expérimentées font état de leurs explorations en se livrant à des danses complexes à la surface de l’essaim. Les lieux indiqués sont alors visités par les abeilles ayant assisté à la danse qui, si elles sont convaincues, dansent à leur tour. Le « débat » ne peut excéder deux à trois jours sous peine de venir à bout des provisions de miel ingérées en quittant la ruche mère. Au fur et à mesure des va-et-vient, seuls les meilleurs sites sont retenus, signalés par des danses plus longues et plus enthousiastes. La discussion s’achève sur un plébiscite, une adhésion de toutes les abeilles au meilleur site proposé.

Une danse et un parfum

On a longtemps cru que la danse des abeilles permettait aux butineuses de retrouver les fleurs découvertes par l’une d’entre elles, fussent-elles à plusieurs kilomètres de la ruche. En réalité, la danse donne deux informations : la direction vers laquelle il faut aller pour trouver les fleurs, et la distance à laquelle elles se situent par rapport à la ruche. Mais ces indices restent très approximatifs. Von Frisch lui-même l’a constaté qui, armé d’un rapporteur et d’une infinie patience, avait passé des heures à mesurer l’axe des danses qu’il observait à travers la paroi vitrée d’une ruche expérimentale. Depuis, des outils plus sophistiqués ont permis d’affiner ses recherches et de démontrer qu’il est impossible à une abeille de trouver des fleurs parfois situées à plus d’un kilomètre de la ruche à partir des seules indications de la danse.

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Publié le 14 mai 2019
4 minutes
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